vendredi 11 juillet 2025

Campagne de Valperdu : La bête immonde

  Campagne de Valperdu - La bête immonde

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1359 : 16 Eléasis

    Sans barguigner les nains pâles acceptent la proposition tarifaire de 20 lions d’or par tête pour 30 rothés. De son côté, s’il a sympathisé avec ses compatriotes une bonne partie de la nuit devant moultes chopines, Kasthendur a pris grand soin de ne rien dévoiler de la mine du clan explorée peu auparavant.

    Très satisfaite, la troupe naine se retire et annonce son retour pour prendre livraison de la marchandise un mois plus tard jour pour jour.

    De son côté, le groupe se disperse. Gidéon prend la direction d’Essembra pour récupérer la dague qu’il a commandité et embaucher des maçons pour le futur chantier du village. En chemin, il compte bien négocier le rachat de la ferme Drezor sur Hap au nom de la communauté. Georges et Tuskan s’éclipsent non sans avoir averti Victor. Ils souhaitent interroger la liche sur les pouvoirs élementaires de Nelson. En effet, ayant déjà mis la main sur trois des quatre frères, ils s’inquiètent grandement du sort prochain de leur camarade d’enfance. Elquirel demande de l’aide à ceux qui restent pour proposer une sépulture digne à sa mère et Nelson lui propose ses services. 

    « Vous êtes ridicules sans votre peau !

    - Ce sont des habits Pritürk le Railleur ! Je t’expliquerai. Et reste là pour surveiller les alentours STP.

    - Quoi tu vas rendre visite à une liche et je ne peux pas t’accompagner !

    - Sois gentil, il faut quelqu’un qui puisse alerter nos amis en cas de pépin. Quelqu’un à l’esprit vif et opiniâtre….

    - D’accord, d’accord, mais ne joue pas trop longtemps avec votre ami, je m’ennuie déjà, moi ».

    Arrivés sur place, le prêtre et le mage se risquent dans la sphère mais Tuskan stoppe bien vite son ami. 

    « Tu ne trouves pas que les couleurs de la sphère ont pâli ? On dirait qu’elle a changé.

    -Tu dois rêver, je ne vois rien pour ma part » le coupe le prêtre sur un ton un peu trop vif pour être totalement crédible.

    Une fois en compagnie de la liche, les questions fusent des deux côtés. Tout en tâchant d’en dire les moins possible à leur interlocutrice, les deux jeunes lanceurs de sort apprennent en retour que le lien non-naturel qui a été tissé entre les 4 éléments pourrait être l’œuvre d’un célèbre archaniste néthere, un certain Eberon. Elle demande de lui amener Nelson le jour où les quatre éléments seront de nouveau réunis pour examen. Elle revient ensuite sur l’épisode de l’orbe et les interroge sur l’objet et leur tentative.  Elle sent que l’objet disposait d’une grande puissance et pense qu’il a pu impacter la sphère. Lorsqu’elle comprend que les couleurs de la sphère ont varié, elle cache mal son excitation et enjoint aux jeunes de pousser différentes expériences à l’aide de divers objets. Ses pronostiques semblent se confirmer et elle tente alors de passer un doigt qui ressort intact quoiqu’un peu altéré. Son excitation est à son comble ; la barrière, comme elle l’avait toujours supposé, finit par s’affaiblir. Côté Georges et Tuskan, la peur va crescendo. Sans mot dire, ils tombent d’accord sur la nécessité de prévenir leurs amis au plus vite. Et, à la première occasion, ils filent sans demander leur reste.

    De retour au village, ils avertissent le groupe qui décide de ne prévenir qu’Horgon , afin de ne pas alerter inutilement leurs concitoyens. Après toute la sphère a baissé en intensité, mais il faudra peut-être encore des années voire des siècles pour qu’elle s’affaisse totalement.

    « Vous prenez vraiment vos désirs pour la réalité !

    - Ça suffit Pritürk, file jouer avec les papillons et arrête de persifler où tu n’auras rien à manger toute à l’heure, vilain chat, va !

    - Ça, c’est pas gentil » boude le pseudodragon en s’éloignant 

    Mais moins d’une minute plus tard, dans sa tête, Tuskan perçoit les rires et la joie de la créature tandis qu’elle joue des farces pendables aux chiens du cru.

    « Vilain chat, va » ironise Tuskan en silence

    « Çà, c’est pas gentil » plaisante le dragonnet

1359 : 17-22 Eléasis

    Dans l’attente du retour de Gidéon chacun a pu jouir de quelques jours de détente en famille. Tuskan a notamment profité du temps à disposition pour acquérir le sort de boule de feu et avancer dans les préparatifs du mariage. Le mage/ roublard rentre porteur de bonnes nouvelles : il a pu recruter de la main d’œuvre sur Essembra et la ferme des Drezor est aujourd’hui officiellement propriété de Valperdu. Comme pressenti, il est décidé de mettre le cap sur Hap le lendemain pour continuer d’explorer le complexe de grotte et sécuriser le périmètre. Le groupe s’accorde pour commencer par la grotte des chitines. Mais il se déchire sur la manière de résoudre la question de leur présence dans ces lieux. Finalement l’option ‘porter le feu et le glaive’ promue par Gidéon, Kasthandur et Nelson est mise de côté pour privilégier l’option diplomatique. 

1359 : 23 Eléasis

Arrivé sur place dans l’après-midi, le groupe préparé à toute éventualité s’engouffre dans le complexe souterrain et prend la direction de la caverne aux bipèdes arachnéens.

    Sur place, les sens de nos héros sont agressés par l’odeur rance, presque moisie et l’humidité constante qui empestent les lieux. De rares champignons bioluminescents diffusent une faible luminosité. Le sol recouvert d’un épais tapis de toile épaisse et collante et d’un dépôt huileux est très glissant. Les parois de la grotte couvertes d’une toile chitineuse donnent à l’ensemble un aspect cocon organique quelque peu oppressant…

    Alors que s’engagent les pourparlers menés par Kasthandur dont le heaume lui assure de parler toute langue, divers groupes de créatures se positionnent de façon à encadrer les aventuriers. L’irruption d’une créature cauchemardesque armée d’une sorte de sceptre et doté d’un monstrueux corps d’araignée boursouflé et du torse et de la tête d’un elfe noir depuis un profond gouffre, sonne la fin des négociations. Selon le nain, le dénommé Talzuris donne l’ordre à ceux qu’ils qualifient d’esclaves de passer tout le groupe au fil de l’épée. Son désir se heurte alors à l’opiniâtreté de ses adversaires qui tiennent tête aux assaillants et au courage de Nelson qui fonce braver la bête qui se croit protégée par la création d’images-miroir nombreuses. Les sorts de Tuskan et les tirs de l’elfe viennent limiter le nombre de reflets, la hargne du guerrier vient progressivement à bout des autres. Le mage, pendant ce temps, constatant une brèche dans le dispositif de défense du groupe vient combler le vide se mettant sciemment à portée des frappes adversaires. Le répit qu’il gagne empêche Georges, Elquirel et Gideon d’être pris à revers, mais il est payé chèrement, le jeune mage s’écroule percé de multiples coups alors que Georges vint lui porter secours. Le prêtre achève le travail entrepris par le mage puis lui porter assistance tandis que Nelson bien qu’ayant enduré de larges blessures, assène un nouveau puissant coup dans l’exosquelette de l’immonde bête qui laisse échapper un ultime râle.

    Les chitines survivants sont épargnés, le groupe récupère les objets du drider (un anneau, son bâton, une ceinture, , une corde enchantée, un livre de sort et une petit boîte en bois stylisant une voile et une ancre). Tuskan emprunte le casque de langage universel à Kasthendur et tente de gagner les chitines à leur cause. Ces derniers prétendent ne vouloir rien d’autre qu’une vie paisible et rejettent toute la responsabilité sur le drider et les étrangers qui viennent s’en prendre à eux et leur famille. Le mage leur promet une coexistence pacifique s’ils sont prêts à faire de même

    Pendant ce temps, le reste du groupe, Tuskan et Georges exceptés, entreprennent l’exploration de la grotte du drider. Ils s’arriment via des cordes et descendent dans l’antre. Son repaire permet de récupérer 12 gemmes d’une valeur de 100 PO chacune, un grimoire et une malsaine statuette en obsidienne représentant une femme elfe noire à la beauté captivante que Gidéon empaquette malgré l’avis contraire du nain prêtre-guerrier. De lugubres cocons révèlent que le drider ne se contentait pas d’imposer le joug de l’esclavage aux chitines, il se repaissait aussi de leurs enfants. Poursuivant l’exploration, les héros découvrent qu’un mur illusoire dissimulait une caverne immense et un raide escalier qui descend le long de ses flancs pour se perdre dans la noirceur. Devant cette découverte Nelson hèle ses deux confrères restés avec les chitines pour qu’ils viennent jeter un œil. Le dragonnet permet alors le survol de la pièce et l’envoi de visions du lieu par l’entremise de Tuskan. L’escalier descend en fait à la verticale pour aboutir plus bas à un large ponton et un immense lac souterrain. 

    Remisant toute investigation supplémentaire pour plus tard, le groupe s’en va retrouver les chitines. Tuskan fait remonter les cocons pour leur remettre et elles semblent touchées par l’attention. Elles révèlent au groupe que le drider avait été intronisé par un groupe d’elfes noirs et qu’il semblait en exil. Elles ne savent pas ce qui existe au-delà de leur grotte, hormis la présence de vieilles ruines et d’en danger inconnu qui a fait que tout ceux qui ont voulu explorer plus avant la zone ont disparu. Depuis lors, elles ont cessé toute tentative de prospection. Le mage les enjoint ensuite de se détourner de la sombre divinité que vénérait le drider et leur promet, si elle se comportent pacifiquement de pouvoir compter toujours sur le groupe en alliés. Joignant le geste à la parole, il demande aux créatures d’évacuer une partie de leur grotte et projette une boule de feu sur la statue de toile représentant une immense drider femelle (que les autochtones prénomment Loth). Leur défunt maître imposait aux créatures arachnéennes de la construire et de l’entretenir. C’est maintenant terminé. L’effet semble porter ses fruits au moins pour un temps. La journée étant bien avancée, les compères regagnent le village de Hap pour se reposer et profiter des services que prodiguent le temple.

jeudi 10 juillet 2025

Pour qui sonne le glas (II)?

 Campagne de Valperdu - Pour qui sonne le glas

Chapitre précédent

    Gidéon, Kasthandur et Georges retraversent en coup de vent le corridor bordé d’alcôves et viennent se camper, menaçants, devant l’affable mort-vivant. Ce dernier ne semble pas en tirer ombrage et les reçoit chaleureusement. Mais le nain, rongé par l’inquiétude, le rudoie vertement et le somme de lui indiquer dans l’instant ce qu’il a pu advenir de ses camarades. Le sujet de ses menaces assure ne pas comprendre de quoi il retourne et propose devant tant de stress, de jouer un morceau de sa harpe pour apaiser les esprits. Le guerrier sacré lui bloque le passage tandis que Gidéon, à bout de patience, détruit tout bonnement l’instrument en tranchant les cordes une à une sous les yeux de son propriétaire. Ce dernier passe alors à l’offensive mais n’est clairement pas de taille face aux trois aventuriers. Ses os jonchent bientôt le pavage. Son épée elfique rejoint le paquetage de Kasthandur. 

    « Qu’est ce qu’on peut faire maintenant pour les retrouver ? » lance Georges

    « Tu vois bien que c’est fichu, aucune trace ici. Ils sont morts. Faut l’accepter » lui rétorque Gidéon, une triste lueur dans les yeux.

    « Ce n’est pas possible, on ne peut pas lâcher les recherches, juste comme ça. Il doit bien rester un lieu à fouiller.

    - Ah oui et où ça ? Tu vois bien qu’on a tout exploré. On a sondé les murs, il n’y a plus rien à voir. On n’aurait jamais dû mettre les pieds ici, on n’était pas au niveau. »

    Les regards se tournent alors vers le nain qui la gorge nouée et les larmes aux yeux récite une prière.

    « Il remet leurs âmes à son dieu et se sent responsable de leur disparition pour avoir allumé la bougie » traduit Georges  .

    Lorsque se finit la litanie, les deux garçons s’en remettent au jugement de leur aîné.

    « Le Vieux, qu’est-ce qu’on fait maintenant ?

    - Tu l’as dis toi-même Gidéon, il n’y a plus rien à espérer ici, on plie bagage.

    - Bon sang comment, on va bien pouvoir annoncer cela au village. Entre l’attaque orque et maintenant …. 

    - Et pense à Emmie et aux familles de nos potes. Ça va être terrible.

    - Je préfère ne pas y songer. Ok pour rentrer le Vieux, même si j’appréhende, le retour. Par contre, hors de question de laisser l’orbe continuer à empoisonner la contrée, je l’empaquette. 

    - Et tu comptes en faire quoi. Tu veux que ton village se transforme en désert de cendres ?

    - Attends un peu, je vous expliquerai en chemin, je crois que j’ai une idée. » lâche énigmatique Georges

1359 : 12 Eléasis

    Plus au nord, dans la forêt, alors que le soleil a fait sa réapparition, les trois jeunes gens ont su convaincre Elquirel de les ramener jusque Hap. Alors qu’ils laissent la clairière derrière eux, Tuskan qui traîne quelque peu à sceller son paquetage croit entendre bouger dans la végétation alentour

    « Qui va là ?

    - Eh le Rasoir, à quoi tu joues encore ?

    - J’ai cru entendre quelque chose, Nelson !

    - Ne crains plus le grand méchant loup, espèce de trouillard, je l’ai refroidi comme il faut !

    - NOUS l’avons refroidi de concert, » rétorque l’elfe a sa gauche. « Et silence, que je vérifie les propos du mage ».

    Elle retourne sur ses pas, examine du plat de la lame diverses plantes. Un silence gêné gagne la clairière pendant qu’elle officie.

    « T’a rêvé, humain, RAS ! Assez perdu de temps ! » La gracile ranger disparaît dans la forêt.

    « Te l’avais bien dit, pleureuse ! Allez en route » appuie le guerrier sous l’œil amusé de Victor avant de s’enfoncer dans les frondaisons. Les compères ne remarquent pas le geste du mage à leur endroit dès qu’ils lui tournent le dos. Croyant surprendre de nouveau un bruit dans les fourrés, sans demander son reste, le lanceur de sort ajuste son paquetage sur son dos et se hâte de s’en aller rejoindre ses comparses.

    Un museau reptilien perce les buissons et, ce que l’on jurerait une sorte de tenu rire grinçant accompagne son repli.

XXXXX

    Durant ce temps, Georges, Gidéon et Kasthandur se réveillent gelés avec une sale migraine.  L’orbe a vraisemblablement puisé leur énergie. Les chevaux eux aussi sont affectés. Il est clair que le transport de l’artefact ne sera pas longtemps envisageable. Alors que le groupe reprend sa marche vers le Valplume, le prêtre détaille son idée. 

    « Vous vous rappelez la grotte de la liche ?

    - Pour sûr ! J’en ai encore froid dans le dos.

    - De quoi, tu parles jeunot ?

    - Ah c’est vrai, on ne te l’avait pas dit, le Vieux ! Disons qu’on a oublié de te le mentionner…

    - Me dites pas que vous fricotez avec une liche !

    - Ce n’est pas tout à fait le terme ! Disons qu’elle n’est pas foncièrement mauvaise, la terminologie serait plutôt « professeur ». Elle est cantonnée dans une grotte au fonds des bois et ravie de nos visites.

    - Mais, c’est pas vrai ! Vous avez deux sous de bon sens ! Une liche, c’est une liche, quoi ! Faut la détruire et surtout pas s’en aller tailler le bon de gras avec elle. Si ça se trouve elle vous a charmé, tas de sagouins !

    - Tu exagères, et puis, laisse-moi expliciter mon intuition, s'il te plaît. Avec tes jérémiades, je ne m’entends plus penser. Or donc, un champ de force antimatière inerte la retient prisonnière dans sa cache. Et l’orbe …

    - N’est pas de la matière vivante » enchaîne Gidéon. « Brillant, très brillant mon ami ! La barrière pourrait détruire l’orbe comme elle l’a fait avec les pierres et les bâtons.

    - Tu as bien dit POURRAIT ! Vous êtes des écervelés. Vous comparez un artefact et de vulgaires cailloux ! Et si ça ne marche pas hein, vous allez détruire la forêt du Valplume ?

    - On ne peut jamais savoir avec la magie le Vieux, faut tester ! Et si ça ne marche pas, et bien on la rapportera ou on l’a trouvée. Et peut-être aussi que la liche saura quoi en faire

    - Ben voyons, amener un objet maudit aux pouvoirs terrifiants à une liche. En voilà une « brillante » idée. Et si c’est votre fichue barrière qui cède, vous vous retrouvez avec une liche en liberté équipée d’une orbe semeuse de désolation !

    - Arrête de jouer les Tuskan, le Vieux ! T’es pas obligé de nous accompagner, si tu as peur. On peut se retrouver à Valperdu

    - Vous le mériteriez, sombres crétins. Mais faudra bien quelqu’un pour vous sortir du pétrin !

    - Bon, c’est donc décidé, direction les bois et on fait un large crochet pour préserver le village.

XXXXX

    Au nord, le quatuor, après une journée harassante, prépare ses quartiers. Tuskan qui s’est senti épié à plusieurs reprises, n’a plus osé en parler, même s’il lui semble qu’Elquirel est apparue sur le qui-vive à plusieurs reprises. Alors qu’il ramasse des branches mortes pour préparer un feu, la stupeur lui fait lâcher tout son fardeau. Une queue squameuse terminée par un imposant aiguillon danse à quelques mètres du sol à la verticale d’un arbre. Le reste de la créature (si c’en est une) demeure dissimulé aux regards derrière le tronc. 

    Alors que le mage cherche frénétiquement des composantes dans sa ceinture, sans détacher son regard de la queue ondoyante, un ricanement étouffé résonne et une petite créature draconique ailée sort de sa cachette. Une voix intérieure s’adresse à Tuskan « Tu es marrant pour un humain !   

    -Tuskan, on arrive ! » crie Victor

    Mais le mage d’un geste lui intime de rester à distance

    « C’est toi qui nous a suivi toute la journée ?

    - Non je t’ai suivi, toi ! J’ai senti ton lien avec la magie. Je m’ennuyais et votre bagarre avec les loups et le monstre j’ai adoré ! Je ne t’ai pas fait trop peur j’espère ? »

    Si l’on en juge l’œil étincelant de la créature, Tuskan jurerait qu’elle a néanmoins pris grand plaisir à le titiller… 

    « Penses-tu je suis un aventurier accompli ! » choisit-il de fanfaronner.

    « Un aventurier, magnifique, comme j’aimerais voyager et connaître le vaste monde !

    - Et qu’est-ce qui te retient ?

    - Il me faudrait un compagnon de voyage. Quelqu’un qui me guiderait et me protégerait !

    - Je pourrais jouer ce rôle, tu penses ?

    - Mais oui, je suis sûr que je m’amuserais énormément avec toi et tes drôles de compagnons.

    - Si le cœur t’en dit, je serais ravi de te présenter à eux. Tu es si mignon ! »

    A réception du compliment un étrange son se fait entendre, Tuskan jurerait une sorte de ronronnement

    « As-tu faim ? J’ai un peu de ration dans mon sac, si tu veux.

    - A manger, chouette ! » Et la créature se jette goulûment sur la ration tendue par le jeune lanceur de sort. Tandis que le glouton se baffre, l’étrange ronronnement redouble

    « On ne s’est pas présenté. Mon nom est Tuskan, le mage humain. Tu es ?

    - Pritürk le pseudo-dragon dans votre idiome

    - Si tu as fini ton repas, Pritürk le Magnifique, approche que je te présente à mes amis

    - Ah oui, on va s’amuser ». Et la créature, sans hésiter, vient se jucher sur l’épaule d’un Tuskan tout étonné. Non sans fierté, le mage rejoint ses compagnons et leur présent son nouvel ami.

XXXXX

    Parvenus à la grotte, Georges, Gidéon explique en détail au nain le fonctionnement de la sphère qui retient la liche. Puis, comme prévu, les deux prêtres balancent l’orbe dans la barrière magique. L’orbe, dans un grésillement, se consume comme espéré. A leur grand soulagement, le rempart mystique semble inaltéré. Se délestant de toute matière inerte, le groupe rend s’enfonce dans la sphère et échange quelques nouvelles avec la liche, lui expliquant notamment qu’en jetant un artefact puissant dans le périmètre, il espérait briser sa cage, mais qu’il avouait son échec. Puis, soulagés de s’en tirer à si bon compte les jeunes hommes prennent congé de la créature néthère et, la soirée étant bien avancée, prennent la direction de Valperdu.

    « Le plus dur reste devant nous » maugrée, lugubre, Gidéon.

    Malgré l’heure tardive à leur arrivée, leur récit de la mort de leurs compagnons se répand de chaumine en chaumine telle une traînée de poudre. Familles et proches, incrédules viennent aux nouvelles. Les larmes et la tristesse s’abattent sur la communauté. Le père de Nelson, renie ses récentes résolutions et se jette sur la dive bouteille. Emmie, les sœurs de Victor et de Tuskan sont inconsolables. Des funérailles sans corps sont programmées pour le surlendemain. Georges se voit chargé de l’oraison funèbre.

XXXXX

1359 : 13 Eléasis

Alors que le village se pare de noir et que seules les pelletées du croquemort et des explosions de pleurs à intervalles rompent la lourde ambiance, les survivants font expertiser par Maître Anthar une partie de leur récent butin. Le vieux magicien identifie une baguette de détection de la magie, une épée courte + 1 ainsi qu’un anneau de résistance au feu.   Georges, pour sa part, reste cloîtré en compagnie de son mentor pour préparer le plus bel hommage possible à ses amis disparus 

    Inconscients de la situation, les trois « défunts », Elquirel et Pritürk se rapprochent de la cité de Hap. L’elfe, d’abord hésitante, se laisse finalement convaincre de pénétrer dans le village humain car les déclarations des garçons ont éveillé sa curiosité et elle souhaite maintenant découvrir le tombeau où pourrait reposer sa mère. Plus en confiance, elle explique que son clan, face à la progression des humains, s’est, il y a des années, déchiré entre partisans de la voie diplomatique menés par sa mère et adeptes de la résistance sans concession, emmenés par la sœur de cette dernière. Ceux-ci se seraient tournés vers de sombres magies. La tombe et les éléments découverts décrits par les aventuriers pourrait être un de leurs repaire, même si la ranger a du mal à imaginer ses congénères recourir à des arts impies à même de détruire une forêt. Chemin faisant, Tuskan briefe leur compagne, de plus en plus nerveuse, sur les us et coutumes de la petite cité, en particulier l’abord un peu frustre et méfiant envers les étrangers de son dirigeant Ephron. Il enjoint à son nouvel ami draconnique de ne pas se montrer au risque de déclencher un mouvement de panique.

    - « Comme ça ? » demande taquin le lézard. Et il disparaît sur l’instant

    - « Incroyable, je sens ton poids sur mon épaule, je peux te toucher et pourtant je ne te vois pas. Tu sais te rendre invisible à volonté ? 

    - Rien de plus aisé.

    - Petit cachotier. En plus de Magnifique, je vais devoir te qualifier de Puissant

    - C’est trop. » réplique le lézard ailé. Il n’en ronronne pas moins de plaisir.

    A la tombée de la nuit, le quintet, extenué, émerge des bois et file droit vers l’auberge. Elquirel semble vouloir disparaître sous sa capuche. 

    « Par Corellon, cet endroit empeste au plus haut point ! J’en ai la nausée. » chuchote t’elle déclenchant le rire chez ses comparses. 

    « Attends de visiter une grande ville comme Essembra, damoiselle des forêts. Tu te rappelleras avec mélancolie des douces senteurs de Hap »

1359 : 14 Eléasis

Après avoir visité Ephron, dame Cathalandra et la famille Drezor, la petite compagnie met le cap vers les Collines bistres. 

« Doivent s’ennuyer ferme à nous attendre depuis tout ce temps. Pas vrai Nelson ?

      - Pour sûr, Victor. Le Souffreteux qui veut toujours qu’on se bouge, il ne doit plus tenir en place. Mais Tuskan, t’es sûr qu’ils y sont toujours ?

    - Tu aurais fait comment à leur place ? Forcément qu’ils guettent notre retour avec impatience.

    … Sur place la déception est grande. Leurs amis ont manifestement levé le camp depuis un moment ne laissant derrière eux que des débris. Elquirel à l’examen du tombeau confirme être bien en présence des restes mortels de sa mère et non de sa soeur. L’armure est bien celle de la cheffe de son clan. Les jeunes conscients qu’il n’y a plus lieu de rester sur place, souhaitent rallier leur village sans plus tarder pour retrouver leurs proches et l’elfe leur demande de l’aide pour emporter la dépouille de sa parente. Un brancard est rapidement élaboré et la troupe file plein ouest vers leur foyer

A proximité du village, Tuskan demande de nouveau à son dragonnet de se rendre invisible afin de faire une surprise à Emmie.

    « Tu as une femelle, comme c’est marrant !

    - Oui et si tu es sage, je te la présenterais dès ce jour. Les gars, personne dans les champs à cette heure pour arroser, étrange non ?

    - Pas de stress, le Rasoir, ils doivent tous être chez Sonia

    - Tuskan a raison, Nelson. Personne non plus à la barrière et les rues sont vides. Mais où sont-ils passés ?

    - Vous vous inquiétez toujours, regardez ils sont tous rassemblés autour de la chapelle. Le pasteur doit invoquer la pluie.

    - Mouiais, Nelson, vise leurs accoutrements, mais avis qu’il y a eu un décès

    -M.., Victor, tu as raison, vite qu’on voit de qui il s’agit, pourvu qu’il ne s’agisse pas du Paternel ! »

    « Car, ce qui est né de la nature, retournera à la terre nourricière et la Grande Mère accueillera comme ses fils, nos héros tombés si jeunes pour préserver la paix dans notre val ».

    - Psss, excuse-moi, Pfeighon, qui est mort ? s’enquit Nelson en tapant sur l’épaule du palefrenier au dernier rang.

    « Et bien, Ahhhhhhhhhh, un, non 3 fantômes ! »

    Une pagaille indescriptible s’empare dans l‘instant de la communauté, certains se signent, d’autres se mettent à courir, Malak se saisit de son médaillon, Emmie et la mère de Victor s’effondrent évanouis…

    « Bon sang, quelqu’un veut bien nous expliquer ce qui se passe ici ! 

    - Victor le fantôme, retourne dans le monde et n’importune pas les vivants, au nom de Chauntéa !

    - Mais vous êtes malades ou quoi ? C’est nous, on est là en chair et en os ! Vous avez encore été raconter quoi vous autres !

    - Mince, on vous a vu disparaître, on vous croyait désintégrés ! » indique un Georges embarrassé, venu lui aussi assister les inconscientes.

    « Purée, Gidéon, tu ne sais pas reconnaitre un sort de téléportation quand il est lancé ! »

    Dans la tête de Tuskan un long rire grinçant résonne : « je sens que je vais adorer ton village, mon ami ! Quelle ambiance !»

1359 : 15 Eléasis

    Le lendemain, le calme revenu, le groupe reconstitué entouré d’amis et de proches retrace les événements survenus depuis leur séparation à l’auberge du village. Tuskan en profite pour s’éloigner quelques instants en compagnie d’Emmie et lui présenter Pritürk pour son plus grand ravissement. Alors qu’ils retrouvent leurs amis, un cor se fait entendre à la barrière du village. Un villageois de faction file chez Hegger, vraisemblablement pour demander la marche à suivre. Alors que les gamins, curieux s’approchent, Hegger ordonne de lever la barrière et une troupe d’une quinzaine de nains blafards pénètre en rang impeccable dans l’enceinte du village.

    « Mâtez leurs amures, on dirait le symbole dessiné sur celle du Kasthandur ! »

    Et en effet, le nain s’approche de la troupe la curiosité piquée au vif.

    Dans un commun hésitant, le chef de la troupe explique que leur communauté isolée du clan de l’Etoile de Fer depuis des centaines d’année a besoin de nourriture et qu’ils sont ici pour négocier un accord commercial si le Valperdu dispose d’excédents à vendre.

    « Bizarre quand même qu’à peine remis la main sur la mine du Vieux, des membres perdus ressurgissent comme par magie !

    - Comme tu dis, va falloir garder un œil sur eux !

    - Bon sang que je sois pendu si ce n’est pas Horgon qui débarque là-bas

    - Quelle journée ! Allons voir ce qui l’amène !

    La fin de journée voit se réunir l’assemblée communale. La perspective de céder une partie du cheptel de rothés contre monnaie sonnante et trébuchante est débattue et acceptée sous réserve du prix qu’accepteraient les nains. Hegger pose la question de l’accueil de deux nouvelles familles fuyant l’instabilité politique du Valbalafre qui souhaitent s’implanter dans la communauté. Cette mention est acceptée elle aussi. Gidéon a bien exprimé le souhait de leur faire occuper la fermer des Drezor au nord, mais le maire de la communauté insiste sur le fait que les nouveaux arrivants souhaitent la protection de l’enceinte villageoise. Gidéon se plie bien volontiers à la décision mais obtient de pouvoir aller négocier le rachat de la ferme Drezor aux survivants sur Hap afin de permettre d’étendre les terres du Valperdu et éventuellement de créer un avant-poste sur la route de Hap. Les informations qu’apportent Horgon sont bien moins réjouissantes : une forte activité elfe noire est à signaler. 




samedi 21 juin 2025

Campagne de Valperdu : la musique adoucit les moeurs?

Campagne de Valperdu - La musique adoucit les mœurs

Chapitre précédent  

    « Vous avez désintégré les gamins, vous allez le regretter, par les dieux ! » hurle Kasthandur.

    La menace, pas plus que les vertus protectrices de la bougie ne semblent impacter la créature qui se dirige sans la moindre hésitation vers le nain qui le défie. Le fracas des armes résonne tandis que le nain et Georges affrontent le mort-vivant. Les deux compères, horrifiés par la disparition de leurs camarades, rendent coup pour coup et refusent de céder le moindre pouce de terrain. Alors que la créature cingle le poitrail de l’humain, ses fluides vitaux, au lieu de retomber au sol, semblent flotter, comme en sustention, puis se dirigent vers l’orbe noire qui les aspire. Gidéon, resté en retrait, tache de prendre le mort-vivant en tenaille. Provoquée de toutes parts, la créature finit par s’effondrer. Le roublard en profite pour ramasser son anneau rouge, puis, armé d’une torche, se dirige vers l’incunable. Le prêtre, de son côté, inspecte l’orbe derrière le trône. Gidéon n’a pas même le temps d’y jeter un œil qu’une créature ignée s’extrait de l’ouvrage pour lui infliger une cuisante brûlure qui lui laisse échapper un cri de douleur. Alerté, Kasthandur, qui s’activait à détecter d’éventuels passages secrets, fonce à la rescousse et les deux combattants renvoient rapidement le monstre dans son plan d’origine. Le bras encore rouge, le jeune larron irrité s’empresse d’embraser l’ouvrage qu’il juge impie. Il ne saura jamais qu’il vient d’incendier un grimoire empli de quantité de sortilèges….

    Le bruit mat du bâton qui cingle le verre l’extirpe de son autodafé hypnotique. Georges s’attache à détruire le sombre artefact. Ses coups ne provoquent pas même un léger impact. Le nain lui intime de laisser faire les véritables guerriers, mais ses marteaux ne provoquent guère plus de résultat. Gidéon devant leurs vaines tentatives, les moque, mais ne peut qu’acquiescer à la théorie de Georges qui pointe que si l’objet lui a volé sa vie, il doit être, de même, la cause de la terrible corruption de la nature alentours.

    « Tu dois avoir raison, mais arrêtez de vous échiner à rien. On a encore un mort-vivant à interroger pas loin. Il en sait peut-être plus sur le sort de nos compagnons ». Sans prendre la peine de lui répondre ses deux collègues ramassent leurs affaires à la hâte et emboîtent le pas du roublard, le visage empreint d’un froide détermination.

    Dans le même temps, Nelson se matérialise à bonne hauteur, à la verticale d’une verte forêt qui s’étend à perte de vue. La force de gravité semble lui promettre un atterrissage terrible quand ses pouvoirs élémentaires se mettent en branle et lui assure une descente pleine de douceur. A peine le temps de remercier ses dieux que des cris déchirants venus de plus haut lui percent les tympans. Le guerrier planant est bien vite dépassé par un Victor bien moins chanceux qui, malgré ses gesticulations en tous sens, ne peut ralentir sa chute et va s’écraser à pleine vitesse en contrebas. Le choc est si violent que le voleur reste inerte au sol. La lente descente du guerrier lui paraît interminable. Dès qu’il touche enfin le plancher des vaches, il fonce au chevet de son ami qui bien qu’inconscient respire encore faiblement.

    En plus des traces de l’impact, le pauvre est perclus de bouts de verre. Les fioles de son sac ont dû se briser dans la chute. Sans plus attendre le guerrier extirpe des potions de soins de son paquetage et fait boire le mourant. Chauntea en soit louée, ses plaies se referment, ses os se ressoudent et sa respiration s’accélère. Il ouvre bientôt un œil encore tuméfié et s’enquit de ce qui vient de leur arriver. L’éclairage du guerrier l’aide bien vite à recouvrer ses esprits. Mais il ne peut que frémir lorsque ce dernier lâche « ce qui s’est passé, je le sais. Quant à savoir où nous sommes…. Loin de la forêt morte si j’en juge la vigueur des feuillages qui nous entourent … 

    - Attends voir, je vais me hisser sur cet arbre. Je pourrais peut-être trouver quelques repères.

    - T’es sûr de pouvoir ? Te rappelles-tu que tu viens de faire une sacrée dégringolade ?


    - Ne t’en fait pas, Beshaba m’a assez enquiquinée pour des mois ! Je me sens en pleine forme.

    Sans plus attendre, l’intrépide garçon entreprend d’escalader un imposant chêne. Parvenu à son sommet, il peut facilement identifier qu’ils se trouvent au nord de Hap. Avisant une rivière, il propose de la suivre. Il y a fort à parier qu’elle les mènera jusqu’à la petite cité d’Ephron.


    Forts de ces données, les deux jeunes gens se rapprochent du cours d’eau et entreprennent de le descendre. À intervalles, Nelson crie le nom de ses compagnons perdus, sans plus grand succès que de faire détaller quelques animaux affolés. Mais bientôt, à quelque distance, un chant clair emplit la contrée. S’approchant à pas mesurés, ils découvrent dans une clairière, une jeune demi-elfe qui fredonne une aubade tout en caressant deux imposants loups. Ses longs cheveux d'un noir de jais cascadent jusqu’à ses reins, ses atours mettent en relief son corps finement ciselé, une harpe sur son flanc gauche fait le pendant  de sa courte hache.


    À quelques lieux de là (ou pas…), Tuskan se rematérialise à un mètre du sol pour un atterrissage en douceur. Il n’a pas guère le temps de rendre grâce à Azuth, patron des magiciens, d’avoir veillé sur son disciple qu’une voix cristalline incompréhensible jaillit sur ses arrières. Faisant volte-face, il se retrouve nez-à-nez avec une gracile jeune femme elfe dardant une flèche sur sa poitrine. Alors qu’il examine plus avant son interlocutrice, tout en faisant un geste de paix, la confusion le saisit. La ravissante créature, hormis ces vêtements champêtres, ressemble trait pour trait à celle du sarcophage dans la pièce qu’il vient de quitter bien involontairement.

    « …, vous êtes la dame du cercueil ? »

Dans un commun hésitant la jeune elfe lui répond

    « Qu’est-ce que tu racontes ? Et c’est moi qui pose les questions ! Je t’ai demandé ce que tu fais ici, jeune humain.

    - Ben, j’étais dans la crypte au cercueil, le mort-vivant a incanté et je me retrouve ici. D’ailleurs c’est où ici ? Et vraiment vous lui ressemblez comme deux gouttes d’eau !

    - Arrête de divaguer et explique-toi, sombre idiot ! Tu pillais une tombe elfique ? »

    La surprise quelque peu passée, mais jaugeant que passer pour un hobereau benêt pourrait le servir pour l’heure, Tuskan détaille, tout en agrémentant son discours de moultes digressions que leur irruption dans le tombeau n’avait pas pour visée le pillage, mais bien de stopper un mal qui contamine les Collines bistres. Il exhibe alors le médaillon prélevé sur les squelettes. Confirmation il s’agit bien du clan familial de son interlocutrice.

    Chacun décline ensuite son identité. L’elfe se nomme Equirel. Le mage apprend qu’il se trouve dans les profondeurs de Cormanthor et que sa vis-à-vis traque quelqu’un ou quelque chose. Elle veut retrouver cette créature avant de décider du sort de son prisonnier. En attendant celui-ci ouvrira la voie en gardant les mains bien levées. Tuskan fait mine de s’en offusquer et récriminant obtempère vaille que vaille. Chemin faisant il tâche d’en apprendre un maximum sur sa compagne de route et surtout ce qu’elle piste, tout en répondant le plus sincèrement possible aux questions qu’elle lui pose. Il comprend bien vite que la piste qu’ils suivent est celle de canidés. Et que leur proie longe le parcours sinueux d’une rivière.

    « C’est un loup ou un chien qu’on poursuit ? » finit-il par lâcher à brûle-pourpoint.

    « Quoiqu’il en soit, je pourrais vous aider, j’ai quelques tours dans mon sac, mais il me faudrait avoir la liberté d’agir. Et surtout goûter quelque repos pour compulser mon grimoire. J’ai bien peur qu’il ne reste guère de sorts offensifs en mémoire.

    -Tu es plus malin que tu veux bien le montrer ». Le complimente son interlocutrice. « Tu peux baisser les bras, mais hors de question de s’arrêter. Ton apparition m’a fait perdre assez de temps. On gagne du terrain, mais au vu de ce que cette chose a laissé derrière elle jusqu’ici, pas question de lui laisser reprendre de la distance.

    - C’est vous qui avez l’arme en main, comme on dit chez moi. À votre guise. Mais la journée a été riche en rebondissements, on a marché toute la journée, le soir tombe et mes jambes ne me portent plus. Sans parler de la faim qui me tenaille » grommèle le garçon. « Je crois sincèrement que vous commettez une méprise.

- Silence, impertinent ! Quel âge as-tu pour pouvoir jauger que les uns ou les autres font fausse route ! Et comme tu dis, c’est moi qui manie l’arc. » Mais malgré elle, la jeune elfe ne peut s’empêcher de sourire discrètement. Un hurlement bestial à glacer le sang retenti, bientôt repris en chœur par d’autres, efface bien vite son sourire.



    Un peu plus tôt, Nelson et Victor depuis leur point d’observation échangent des regards interrogateurs. Faut-il entrer en contact avec la ravissante créature ? Le destin ne leur laisse pas le soin de trancher. Les grognements des deux loups dans leur direction ne laissent planer aucun doute. Leur position est connue. Un rire léger monte vers les arbres.

    « Approchez jeunes gens. Les cris que vous lancez à intervalles et le bruit de vos bottes font que je sais votre présence depuis un moment. Seriez-vous perdus dans ces magnifiques bois ? N’ayez aucune crainte mes fidèles compagnons se montreront des plus amicaux, … tant que je leur en donne l’ordre. Ne soyez pas timides, sortez de votre cachette et venez vous présenter. Je suis Mirel la barde et serais ravie de pouvoir converser avec vous. J’ai beau aimer les animaux, les conversations poussées me manquent quelquefois. »

    Haussant les épaules à Victor qui le questionne du regard, Nelson se relève de son taillis et s’avance vers la chanteuse, suivi de près par le roublard. Parvenus à quelques mètres de distance, les grognements rapprochés des deux carnassiers leurs font porter la main au fourreau, sous le regard amusé de leur hôtesse.

    « Allons, ne laissez pas la bile vous envahir, mes agneaux. Mes gardes sont un tantinet protecteur ». Elle se baisse, leur murmure à l’oreille et les deux créatures, toujours grognant, s’éloignent de quelques mètres.

    Les présentations sont esquissées. Mirel s’enquit de leur état et leur propose de leur servir de guide jusqu’à Hap. Un repas est partagé, la route reprise, des morceaux de vie échangés. Nelson toujours prompt aux rodomontades y trouve un terrain favorable et multiplie les récits de ‘ses’ exploits personnels sous les applaudissements nourris de la demi-elfe, qui en redemande. Elle commence à composer des odes à la gloire du héros du Valbataille. Les loups pour leur part, s’ils ne se laissent pas approcher semblent gagnés par la bonne ambiance régnante.

    Alors que le soir se rapproche, la joyeuse compagnie se fixe dans une clairière à proximité du cours d’eau vive, dresse le campement et, après un frugal repas, Mirel se propose de jouer les premiers couplets de la geste de Nelson. La mélopée débute, la merveilleuse voix de Mirel s’élève et le ravissement gagne l’auditoire tandis que les loups se rapprochent pour se lover aux pieds de leur maîtresse. Les deux garçons sentent une douce torpeur les envahir et Victor ferme bientôt les paupières. Une voix intérieure alarme bientôt le guerrier, on use de magie à son endroit. S’arrachant de sa somnolence, Nelson s’ébroue, secoue son ami pour le réveiller et jette un regard mauvais à la barde. Narquoise, elle soutient son regard sans broncher et interrompt sa mélodie.

    « Tu es vraiment encore plus idiot que je ne le pensais, Nelson le bravache. Je t’offrais une mort douce, tu optes pour la douleur. À l’attaque mes anges. Que le festin commence !» Se relevant promptement les deux prédateurs s’avancent en grognant vers leurs proies. Les deux jeunes s’emparent de leurs armes. Les belligérants se jaugent. À quelques pas de là, dans la clarté blafarde de la lune, le souffle de la barde semble s’accélérer, devient soudainement haché, comme douloureux. Son corps, autrefois gracile et harmonieux, se cambre sous une tension insupportable. Sa peau perle de sueur avant de se tendre, se craqueler, comme si quelque chose poussait de l’intérieur pour la déchirer. Ses doigts tremblent, se recourbent, les ongles noircissent, s’allongent, deviennent des griffes. Elle pousse un cri — un son mi-humain, mi-animal — alors que ses articulations se déplacent, que ses os se brisent et se reforment dans un craquement sec. Ses yeux, autrefois d’un brun doux, brillent d’un éclat doré et félin, et sa mâchoire s’étire en un museau déformé, hérissé de crocs. Elle hurle de nouveau à la nuit et ses loups s’associent à sa mélopée sauvage.

    À quelques mètres de là, Elquirel se fige, puis sans un regard pour Tuskan, file en direction du hurlement. Bien que privé de sorts, Tuskan s’élance sur ses talons. Entendre jaillir le cri de guerre de son fidèle ami « Nelson, Nelson, Ouais ! » lui redonne du courage. Mais la vision d’une créature mi-homme, mi-loup hurlant dans la clairière tandis que deux loups s’abattent sur ses camarades le rempli d’effroi. L’elfe, un peu en amont, ne s’embarrasse guère de ses considérations et lâche flèche sur flèche sur le monstre qui se rue furieux à sa rencontre. Une terrible mêlée s’enclenche.

    « Tymora me protège. Sans sort, à quoi je peux bien servir, ne sachant même pas manier cette fichue bardiche. Et puis zut, que les Abysses me foudroient, tu deviseras plus tard, Tuskan »

    Dans un haussement d’épaule, le mage se porte au soutien de l’elfe. Ce qu’il pense être son plus beau coup à l’aide de son arme, ne rencontre que le vide. Son adversaire est bien trop puissant. Changeant de tactique, le jeune homme rompt le combat et se porte au secours de ses amis. Presque arrivé à leur hauteur, il constate que Nelson vient de finir son adversaire et s’apprête à se jeter sur celui d’un Victor en bien fâcheuse posture.

    « Laisse, je m’en charge, occupe-toi du chef.
    - Tuskan ? Que fais-tu ici ?
    - Plus tard elle est dans de sales draps court la sauver
    - Cette saleté d’elfe, j’en fait mon affaire !
    - Euh non, surtout pas, elle est de notre côté ! C’est le garou dont tu dois t’occuper !».

    Mais le guerrier ne l’écoute déjà plus et relâchant son cri de guerre, il fonce en direction des grognements et bruits de combat. Dès qu’il avise le monstre, il charge sans une once d’hésitation. Prise entre une habile sabreuse et un puissant combattant, Mirel passe vite de vie à trépas et Nelson s'accapare sa hachette finement ciselée. Le calme revenu, Tuskan introduit tout ce beau petit monde, tout en bandant les plaies de son comparse.







samedi 14 juin 2025

Campagne de Valperdu - La sombre forêt

 Campagne de Valperdu - La sombre forêt

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1359 : 10 Eléasis (suite)

    La sombre forêt semble comme pétrifiée. Sise dans une cuvette d’environ deux kilomètres de rayon. Au sol, nulle feuille, aucune trace de vie. Tout y est mortellement silencieux. Une abomination aux yeux de Chauntea qui doit être soignée par tout moyen déclare un Georges profondément heurté. Tuskan recourt à la magie pour s’élever dans les airs et depuis la lisière de la zone morte, au centre de la cuvette, il distingue une masse plus sombre. La compagnie propose de s’installer en bordure et de profiter de la nuit qui se profile pour goûter quelque repos. Mais Gidéon exhorte la troupe à se lancer de suite dans l’exploration. Nullement découragé par le peu de succès rencontré, il s’enfonce seul dans la lugubre contrée. Après avoir parcouru deux cent mètres, il débouche sur une clairière Les arbres qui l’occupent sont plus massifs que leurs homologues alentours. Un étrange pressentiment le met mal à l’aise. Soudain un hurlement rappelant celui d’un loup en plus sinistre retentit. D’autres lui répondent bientôt en différents points de la forêt. Une meute semble se lancer dans une chasse et leur gibier n’est pas difficile à deviner. Le jeune homme, saisi de terreur, s’élance de toute sa vitesse en direction de son campement. Les créatures semblent chercher à l’encercler. Alors que l’étau se resserre, ses amis, accourus à la rescousse, le rejoigne, la troupe rebrousse chemin au plus vite. Les monstres semblent lâcher prise dès qu’ils sortent des bois. En périphérie, Victor jurerait avoir entraperçu une ombre gigantesque. La confrérie profite du calme revenu pour passer au lit.

1359 : 11 Eléasis

    Les aventuriers, tous les sens aux aguets, investissent la zone morte. L’idée étant de se diriger au centre de la cuvette vers la masse de noirceur.  Dans la cendre, des traces révèlent le passage récent de loups. Rapidement des hurlements glaçants envahissent le calme pesant des lieux. L’objectif des créatures ne laisse planer aucun doute, elles encerclent le groupe et resserrent peu à peu le cercle. Elles sont bientôt visibles. Il s’agit bien de créatures lupines morts-vivantes. Sans attendre Kasdanthur allume une des bougies découvertes dans le repaire du magicien à Hap. « Voilà qui devrait les ralentir quelque peu » note t-il satisfait.

    Un féroce combat s’engage, mais gênés par l’effet magique, les prédateurs ne sont pas en mesure de proposer une attaque concertée. Au contraire des Valiens habitués à combattre en rang serré. Les monstres sont détruits un par un. Mais les jeunes jubilent un peu trop vite. Alors qu’oubliant toute prudence, ils échangent forces bravades, une énorme branche, de la taille des cuisses de Nelson, vient heurter le guerrier en plein torse, l’envoyant voler plusieurs mètres en arrière. Un arbre mort extirpe ses racines du sol et vient se mêler à la mêlée. Son regard rougeoyant brûle de malveillance. Malgré la puissance de ses coups, il est rapidement clair que la bougie du nain qui continue de diffuser ses essences gêne la monstruosité. Georges saisie d’une horreur mystique par cette perversion de la nature, redouble de charge. Quel que soit l’origine du mal, un treant, fidèle gardien des arbres a connu une ultime profanation. Nelson ne ménage pas sa peine pour se venger de l’affront fait à sa dignité et le reste du groupe multiplie les coups. Bientôt le mort-vivant, vacille et s’écroule lourdement dans la poussière. Chacun reprend ses esprits et la colonne reprend sa marche dans l’environnement lugubre de la forêt morte.

    Bientôt, des pierres affleurent du sol et marquent la présence d’antiques habitations, poursuivant plus avant, la compagnie débouche sur des ruines plus imposantes. Leur origine elfique ne fait aucun doute. Voici l’origine de la masse sombre observée le jour précédent au centre de la cuvette. Alors que Tuskan commence à étudier les lieux, l’irruption de six squelettes repousse à plus tard ses chères études. La fureur des combats s’élève. Les simulacres de vie bien que ne connaissant nulle peur, sont vite terrassés. La finesse de leurs os et leur taille semblent indiquer qu’ils furent autrefois des elfes. Chacun arbore un médaillon d’argent stylisant des arbres. Le groupe en déduit qu’il pourrait s’agir du symbole d’une maison elfique. Chacun récupère un médaillon. Certains l’enfilent d’autres plus prudents optent pour l’envelopper et le ranger dans leur paquetage. Leurs lames sont elles aussi d’excellente facture malgré leur apparence gracile et rejoignent l’arsenal du groupe. Une fouille plus méthodique des environs débute.

Bientôt le sifflement de Georges rameute la petite troupe. Il a débusqué un escalier qui s’enfonce sous terre. Bien qu’un coude masque rapidement la voie, il est indéniable qu’une source de lumière diffuse sa clarté. Gidéon le nyctalope se risque dans le boyau. Parvenu dans le virage, il aperçoit un couloir illuminé magiquement qui se termine quelques mètres plus loin par une lourde porte de chêne. Des gravures représentant des arbres y figurent couplées à une épée longue stylisée fichée dans un crâne et s'extirpant par sa bouche. Le larron fait son rapport au groupe. Alors que l’on convient de procéder à la présence d’un piège éventuel, Nelson gagné par la lassitude, se rue dans le boyau et jetant toute prudence aux orties, ouvre la porte, sans rien déclencher fort heureusement.



    Le battant s’ouvre sur une petite pièce carrée. En son centre, est posée une harpe. Une double porte de pierre sans ornement fait face directement à son homologue en chêne dans le mur du fond. Dans un angle un squelette vêtu d’une robe de bure, épée courte au fourreau, semble observer attentivement le puissant guerrier qui vient de faire irruption et la curieuse cohorte qui lui emboîte le pas. Sans aucune agressivité, il accueille, dans un parfait commun, les visiteurs et se présente comme un membre  de la maison elfique Ichante. Se montrant tout particulièrement chaleureux envers Tuskan qui porte ostensiblement le médaillon de sa maison, il l’engage à poursuivre plus avant dans le complexe. Et propose de jouer un air de harpe à ses visiteurs, mais essuie leur refus. Gidéon, Victor et Kasdanthur suivent l’exemple du jeune mage et enfilent le bijou. Ils peuvent sans souci suivre le lanceur de sort. Seuls Georges et Nelson, méfiants, s’y refusent. Le squelette leur interdit de pousser plus avant. Après quelques tergiversations et tentatives avortées de négociation, ils finissent eux aussi par obtempérer et passent autour de leur cou le médaillon pour poursuivre dans le couloir sombre.

 














    Le groupe parvient alors dans un couloir bordé d’alcôves. Aucun piège n’étant détecté, Gidéon utilise sa baguette de détection des passages secrets. Mais sans plus de réussite. La porte suivante s’ouvre sur une nouvelle pièce carrée. En son centre repose un cercueil de verre. Il abrite une superbe jeune elfe qui semble endormie. Derrière, sur une estrade, un trône de verre, le même arbre stylisé y est gravé. Un autre squelette en robe de bure y est assis et observe les héros de son regard rouge hypnotique. Il arbore lui aussi le médaillon de la famille Ichante. A proximité, un présentoir sur lequel repose un antique livre ouvert duquel irradie une forte chaleur. Dans le mur du fond une alcôve abrite une étrange sphère noire qui ne laisse rien présager de bon.

    Après quelques instants où chacun se dévisage intensément, Kasdanthur rompt l’immobilisme ambiant en se jetant sur sa bougie et en l’allumant afin de tenir à distance l’inquiétant mort-vivant. Ce dernier, nullement impressionné en retour effectue de ses bras d'amples mouvements de bras, dévoilant un court instant un anneau d'un rouge intense fixé çà un doigt décharné. Lorsque ses bras retombent la Nelson, Tuskan et Victor ont tout simplement disparu …

dimanche 1 juin 2025

Campagne de Valperdu - Retour à la maison

 Campagne de Valperdu - Retour à la maison

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1359 : 07 Eléasis

    S’appuyant sur la carte régionale subtilisée au Zhentarim, nos héros localisent d’antiques vestiges, indubitablement d’origine naine. Manifestement, de vieux comptoirs commerciaux adossés à un fortin. Le soleil est déjà au zénith. Malgré l’impatience extrême de Kasdanthur qui pousse à investiguer plus avant, le groupe fait halte pour se restaurer. Puis l’exploration méthodique reprend. Le regard de Nelson s’enflamme bientôt, tandis que ses locataires élémentaires perçoivent la proximité d’un de leur frère. Un sifflement sur leur droite fait accourir toute la communauté qui s’était espacée. Victor vient de découvrir deux immenses statues de forgerons nains de plus de trois mètres de haut.


« Bien vu, fiston ! » lâche un Kasdanthur fébrile. « La porte ne doit pas être loin. ».

Et il s’avance gaillardement vers les œuvres de ses ancêtres. Les jeunes le voient emprunter un escalier qui se termine dans la paroi. Les échelons gravis, le prêtre-guerrier s’agenouille et ses prières rauques montent vers les nuées.

Depuis leur position, les garçons sidérés voient se dessiner sur la roche le dessin de portes surmontées de deux étoiles à quatre branches et d’une enclume. Deux sortes d’écuelles de pierre émergent de la paroi.

« Eh, ce n’est pas la copie de l’étrange tatouage qui orne sa voûte plantaire malodorante ? »  questionne Georges.

« Vil faquin qui nous baladait avec ses histoires de rides étranges et sans valeur quand on l’interrogeait. » s’amuse Tuskan.

« Bon allons, le retrouver avant qu’il ne fasse des âneries » prévient Gidéon.

« Je vous rejoins, je m’occupe de trouver un endroit sûr et herbeux pour les montures. Qui sait combien de temps on va errer sous la montagne. » rajoute le mage

« A condition que le bourru dispose d’un moyen d’entrer …. » glisse un Victor au sourire narquois

« Y’a intérêt. C’est à l’intérieur que ça se passe, je le sens. S’il le faut je bousille la montagne pour y entrer. » lâche Nelson le regard fiévreux. Sans remarquer les regards inquiets qu’échangent Tuskan et Georges dans son dos…

Tandis que Tuskan regroupe les chevaux, le reste de la troupe rejoint le nain. Ils trouvent ce dernier, en conversation avec des entités constituées de roche. Des élémentaires chargés par ses aïeux de garder l’accès à la mine.


    Mais les portes, demeurent closes. Le prêtre-guerrier tente de déposer différentes offrandes plus ou moins somptuaires dans les contenants apparus. Sans autre résultat que de se faire houspiller par la jeunesse. Son sang, de la lignée du clan de l’Etoile de Fer sera finalement son sésame. Il délivre quelques gouttes dans chacune des écuelles et, dans un grincement inquiétant les linteaux majestueux s’ouvrent pour la première fois depuis depuis trois millénaires.

    Le groupe, rejoint par Tuskan se prépare à explorer les lieux. Des torches révèlent un large couloir de trois mètres de large et de quatre mètres de hauteur parfaitement taillé à même la roche. Passé quelques mètres, une grille empêche toute progression.

    « Contemplez la magnificence du hall de mes ancêtres, jeunes humains !  déclame un Kasdanthur les yeux embués de larmes.

- Le ménage laisse à désirer, ose Gidéon

    - Et garde à l’esprit que cette mine, juridiquement appartient au Valplume, le vieux. Pas d’emballement, ironise Tuskan.

    - Rèpète et tu tâteras de ma hache, cloporte

    - Pour ça faudrait que tu saches encore courir, mais vu ton âge canonique…

    - En tous cas, ça va vous coûter cher en loyer cette location, renchérit Gidéon

    - Espèce de freluquet souffreteux, tu vas voir de quel bois je me chauffe, fulmine le nain

    - Paix le vieux » marque Georges la main sur l’épaule du nain. « Attends d’avoir exploré, la zone avant de débiter ces énergumènes en brindilles. Ils peuvent encore te servir de pare-feu. En tout cas c’est une odyssée qui arrive à son terme. »

    « Pas faux. Je vais devoir délaisser la vie d’aventurier au profit de celle de chef de clan. Au moins je n’aurais plus à entendre vos fadaises. » glousse le nain en jetant un regard mauvais aux deux lanceurs de sort

    « Tu ne vas pas savoir nous abandonner le vieux. Qu’est ce qu’on deviendra sans toi ! » lance, goguenard, Tuskan

    « Oui imagine dans quel pétrin on se fourrera dès que tu auras reposé la hache » ajoute Gidéon un clin d’œil appuyé en direction du mage.

« Au moins vous avez un peu de lucidité, tout n’est pas à jeter ».

    « Bon on y va ou on attend la Rencontre des Boucliers. Va falloir que tu m’aides à dézinguer cette herse le nain. Le mécanise d’ouverture est, sans surprise, à l’intérieur. » s’impatiente Nelson

    « J’ai mon idée sur la question » poursuit, sibyllin, Gidéon tout en farfouillant dans son paquetage.

    Il s’empare d’une fiole dont il ingurgite le contenu. Quelques instants plus tard, métamorphosé en brume, il traverse la barrière sans résistance, reprend corps et actionne le levier d’ouverture. La herse se relève sans bruit comme huilée du jour.

    « Travail de nain, graines de vaurien, travail de nain. »

    Une découverte prudente des alentours commence. Le couloir mène à une vaste pièce baignée par un puits de lumière. Une déchirure béante d’environ dix mètres de diamètre dans son plafond en est la source. La pièce est jonchée de débris de roches, de végétation et de cadavres d’animaux et de petits humanoïdes, vraisemblablement des kobolds.

    « Travail de nain, le nain, travail de nain » raille Victor

    « Ose persiffler une fois de plus et je t’arrache la langue le sournois »

    Tuskan coupe alors : « Arrêtez vos chamailleries, deux minutes. C’est quoi cet arbre jaunâtre près du puits, Georges ? Matez-moi ça, les squelettes sont plus nombreux encore à proximité de ses racines.

    - Un hibiscus d’Aurile je dirais. Bourré d’épines. Inoffensif. Superbe floraison automnale qui perdure malgré les gelées » avance le prêtre après quelques instants d’observation.

    « Sûr de ce que t’avance, gamin ? Y’a quand même un truc à l’origine de tous ses macchabés. 

    -Tu te fais trop de souci, le vieux. Georges a toujours été le premier en cours de botanique » assure Gidéon. Et il s’avance hardiment pour identifier les causes des décès.

    A quelques mètres du tronc, il fouille le premier corps. « Eh regardez ! Il a encore sa bourse, qui sait sur quel trésor je viens de mettre le grappin. »  Un mauvais pressentiment lui parcourt l’échine et, vif comme l’éclair, il effectue une magistrale roulade sur sa droite tandis qu’une volée d’épines vient se ficher dans le sol juste où il se trouvait un instant auparavant.

    « Inoffensif, hein ? Foutus je sais tout » maugrée Nelson tout en chargeant en direction de l’horrible arbre.

    « Attends faut le harceler de là où ses épines ne sauraient l’attendre » hurle Tuskan à son compère.

     Peine perdue, le guerrier suivi comme son ombre par le nain s’élance pour le corps-à-corps. Le mage hausse les épaules et commence son incantation. Sur sa gauche, Georges fait tournoyer sa fronde. Dans le même temps, Gidéon et Victor tachent de se trouver une zone à l’abri des épines. Les projectiles mauves de Tuskan sifflent aux oreilles des combattants, les dépassent et viennent s’écraser sur le tronc. L’arbre relâche une floppée de piques plus nombreuses encore, lardant les deux compères en approche. Arrivé au pied de l’arbre, Nelson s’avise de changer de tactique au dernier instant. Au lieu d’abattre son fléau, il jette sa torche au pied de la plante, fait demi-tour et, sans écouter les récriminations offusquées du nain, l’entraîne de force hors de portée des épines malgré une nouvelle bordée.

    La compagnie laisse l’arbre se consumer doucement et lui tourne le dos pour continuer l’exploration de la grotte après avoir pansée ses plaies. Kasdanthur les interpelle rapidement. Il a découvert une gigantesque forge qui se remet en route à son approche. Y percevant un signe divin, le prélat s’agenouille et récite une prière. En réalité, la forge est magique, un élémentaire y est lié et l’active. Malgré son âge, elle est toujours pleinement fonctionnelle. Il suffit de lui apporter la matière première. C’est du moins ce qu’apprend le nain en échangeant avec l’élémentaire.


    Tandis que le prêtre-guerrier dialogue avec l’esprit de la forge, Nelson, consumé par l’impatience, s’éloigne explorer la zone ouest de la caverne, Gidéon sur les talons. La route qui mène à l’élémentaire qu’il convoite passe par là, il en est certain. Le dallage impeccable cède la place à un plancher naturel. Alors qu’il s’enfonce dans la grotte, ils réveillent une colonie de chauve-souris qui paniquée entrave leur progression. A peine le temps de s’extirper de la nuée qui finit par s’échapper par la cheminée naturelle creusée par l’effondrement du plafond que deux énormes chauve-souris de plus d’un mètre d’envergure passent à l’attaque. Elles ne sont que de peu de poids face au guerrier qui les exterminent impitoyablement. 

    Tandis que le reste de la communauté les rejoint, Gidéon fait main basse sur des gemmes et des pièces d’or éparpillées dans la grotte. Un joli petit pactole.  L’exploration de la mine reprend, sous l’impulsion d’un Nelson de plus en plus nerveux. Il sent qu’il lui faut traverser la rivière qui coupe la grotte.

    Alors que ce dernier emprunte un guet en compagnie de Victor, Gidéon et Kasdanthur, l’eau de la rivière se met à bouillonner de façon exponentielle.  Un esprit de l’eau en émerge et passe à l’attaque. Faisant appel à la puissance de son dieu, Georges, resté en retrait, élimine promptement la menace.

    Nelson, quasi extatique reprend sa marche en avant et découvre le trésor qu’il est venu chercher un peu plus loin. L’élémentaire de terre. Lévitant au-dessus du sol, le même étrange ballet martial entre les différents éléments reprend de plus belle. Mais pour trois jours cette fois. Résignés, ces compagnons dressent le campement à proximité pour veiller sur leur ami pendant sa longue phase d’assimilation. Georges et Tuskan ne cachent pas leur inquiétude quant à ce qui pourrait se produire lorsque leur frère d’armes aura fusionné avec les quatre élémentaires. Vraisemblablement pas ce à quoi Nelson assurément.

1359 : 10 Eléasis

    Nelson revenu dans le monde des vivants, chacun s’enquiert de son état. Georges l’ausculte et teste ses réflexes. Tout semble normal hormis son regard emprunt de flammèches à intervalle.  Les explorateurs remontent en selle et prennent la direction de la forêt d’arbres morts entraperçue lors de leurs précédentes missions.