samedi 21 juin 2025

Campagne de Valperdu : la musique adoucit les moeurs?

Campagne de Valperdu - La musique adoucit les mœurs

Chapitre précédent  

    « Vous avez désintégré les gamins, vous allez le regretter, par les dieux ! » hurle Kasthandur.

    La menace, pas plus que les vertus protectrices de la bougie ne semblent impacter la créature qui se dirige sans la moindre hésitation vers le nain qui le défie. Le fracas des armes résonne tandis que le nain et Georges affrontent le mort-vivant. Les deux compères, horrifiés par la disparition de leurs camarades, rendent coup pour coup et refusent de céder le moindre pouce de terrain. Alors que la créature cingle le poitrail de l’humain, ses fluides vitaux, au lieu de retomber au sol, semblent flotter, comme en sustention, puis se dirigent vers l’orbe noire qui les aspire. Gidéon, resté en retrait, tache de prendre le mort-vivant en tenaille. Provoquée de toutes parts, la créature finit par s’effondrer. Le roublard en profite pour ramasser son anneau rouge, puis, armé d’une torche, se dirige vers l’incunable. Le prêtre, de son côté, inspecte l’orbe derrière le trône. Gidéon n’a pas même le temps d’y jeter un œil qu’une créature ignée s’extrait de l’ouvrage pour lui infliger une cuisante brûlure qui lui laisse échapper un cri de douleur. Alerté, Kasthandur, qui s’activait à détecter d’éventuels passages secrets, fonce à la rescousse et les deux combattants renvoient rapidement le monstre dans son plan d’origine. Le bras encore rouge, le jeune larron irrité s’empresse d’embraser l’ouvrage qu’il juge impie. Il ne saura jamais qu’il vient d’incendier un grimoire empli de quantité de sortilèges….

    Le bruit mat du bâton qui cingle le verre l’extirpe de son autodafé hypnotique. Georges s’attache à détruire le sombre artefact. Ses coups ne provoquent pas même un léger impact. Le nain lui intime de laisser faire les véritables guerriers, mais ses marteaux ne provoquent guère plus de résultat. Gidéon devant leurs vaines tentatives, les moque, mais ne peut qu’acquiescer à la théorie de Georges qui pointe que si l’objet lui a volé sa vie, il doit être, de même, la cause de la terrible corruption de la nature alentours.

    « Tu dois avoir raison, mais arrêtez de vous échiner à rien. On a encore un mort-vivant à interroger pas loin. Il en sait peut-être plus sur le sort de nos compagnons ». Sans prendre la peine de lui répondre ses deux collègues ramassent leurs affaires à la hâte et emboîtent le pas du roublard, le visage empreint d’un froide détermination.

    Dans le même temps, Nelson se matérialise à bonne hauteur, à la verticale d’une verte forêt qui s’étend à perte de vue. La force de gravité semble lui promettre un atterrissage terrible quand ses pouvoirs élémentaires se mettent en branle et lui assure une descente pleine de douceur. A peine le temps de remercier ses dieux que des cris déchirants venus de plus haut lui percent les tympans. Le guerrier planant est bien vite dépassé par un Victor bien moins chanceux qui, malgré ses gesticulations en tous sens, ne peut ralentir sa chute et va s’écraser à pleine vitesse en contrebas. Le choc est si violent que le voleur reste inerte au sol. La lente descente du guerrier lui paraît interminable. Dès qu’il touche enfin le plancher des vaches, il fonce au chevet de son ami qui bien qu’inconscient respire encore faiblement.

    En plus des traces de l’impact, le pauvre est perclus de bouts de verre. Les fioles de son sac ont dû se briser dans la chute. Sans plus attendre le guerrier extirpe des potions de soins de son paquetage et fait boire le mourant. Chauntea en soit louée, ses plaies se referment, ses os se ressoudent et sa respiration s’accélère. Il ouvre bientôt un œil encore tuméfié et s’enquit de ce qui vient de leur arriver. L’éclairage du guerrier l’aide bien vite à recouvrer ses esprits. Mais il ne peut que frémir lorsque ce dernier lâche « ce qui s’est passé, je le sais. Quant à savoir où nous sommes…. Loin de la forêt morte si j’en juge la vigueur des feuillages qui nous entourent … 

    - Attends voir, je vais me hisser sur cet arbre. Je pourrais peut-être trouver quelques repères.

    - T’es sûr de pouvoir ? Te rappelles-tu que tu viens de faire une sacrée dégringolade ?


    - Ne t’en fait pas, Beshaba m’a assez enquiquinée pour des mois ! Je me sens en pleine forme.

    Sans plus attendre, l’intrépide garçon entreprend d’escalader un imposant chêne. Parvenu à son sommet, il peut facilement identifier qu’ils se trouvent au nord de Hap. Avisant une rivière, il propose de la suivre. Il y a fort à parier qu’elle les mènera jusqu’à la petite cité d’Ephron.


    Forts de ces données, les deux jeunes gens se rapprochent du cours d’eau et entreprennent de le descendre. À intervalles, Nelson crie le nom de ses compagnons perdus, sans plus grand succès que de faire détaller quelques animaux affolés. Mais bientôt, à quelque distance, un chant clair emplit la contrée. S’approchant à pas mesurés, ils découvrent dans une clairière, une jeune demi-elfe qui fredonne une aubade tout en caressant deux imposants loups. Ses longs cheveux d'un noir de jais cascadent jusqu’à ses reins, ses atours mettent en relief son corps finement ciselé, une harpe sur son flanc gauche fait le pendant  de sa courte hache.


    À quelques lieux de là (ou pas…), Tuskan se rematérialise à un mètre du sol pour un atterrissage en douceur. Il n’a pas guère le temps de rendre grâce à Azuth, patron des magiciens, d’avoir veillé sur son disciple qu’une voix cristalline incompréhensible jaillit sur ses arrières. Faisant volte-face, il se retrouve nez-à-nez avec une gracile jeune femme elfe dardant une flèche sur sa poitrine. Alors qu’il examine plus avant son interlocutrice, tout en faisant un geste de paix, la confusion le saisit. La ravissante créature, hormis ces vêtements champêtres, ressemble trait pour trait à celle du sarcophage dans la pièce qu’il vient de quitter bien involontairement.

    « …, vous êtes la dame du cercueil ? »

Dans un commun hésitant la jeune elfe lui répond

    « Qu’est-ce que tu racontes ? Et c’est moi qui pose les questions ! Je t’ai demandé ce que tu fais ici, jeune humain.

    - Ben, j’étais dans la crypte au cercueil, le mort-vivant a incanté et je me retrouve ici. D’ailleurs c’est où ici ? Et vraiment vous lui ressemblez comme deux gouttes d’eau !

    - Arrête de divaguer et explique-toi, sombre idiot ! Tu pillais une tombe elfique ? »

    La surprise quelque peu passée, mais jaugeant que passer pour un hobereau benêt pourrait le servir pour l’heure, Tuskan détaille, tout en agrémentant son discours de moultes digressions que leur irruption dans le tombeau n’avait pas pour visée le pillage, mais bien de stopper un mal qui contamine les Collines bistres. Il exhibe alors le médaillon prélevé sur les squelettes. Confirmation il s’agit bien du clan familial de son interlocutrice.

    Chacun décline ensuite son identité. L’elfe se nomme Equirel. Le mage apprend qu’il se trouve dans les profondeurs de Cormanthor et que sa vis-à-vis traque quelqu’un ou quelque chose. Elle veut retrouver cette créature avant de décider du sort de son prisonnier. En attendant celui-ci ouvrira la voie en gardant les mains bien levées. Tuskan fait mine de s’en offusquer et récriminant obtempère vaille que vaille. Chemin faisant il tâche d’en apprendre un maximum sur sa compagne de route et surtout ce qu’elle piste, tout en répondant le plus sincèrement possible aux questions qu’elle lui pose. Il comprend bien vite que la piste qu’ils suivent est celle de canidés. Et que leur proie longe le parcours sinueux d’une rivière.

    « C’est un loup ou un chien qu’on poursuit ? » finit-il par lâcher à brûle-pourpoint.

    « Quoiqu’il en soit, je pourrais vous aider, j’ai quelques tours dans mon sac, mais il me faudrait avoir la liberté d’agir. Et surtout goûter quelque repos pour compulser mon grimoire. J’ai bien peur qu’il ne reste guère de sorts offensifs en mémoire.

    -Tu es plus malin que tu veux bien le montrer ». Le complimente son interlocutrice. « Tu peux baisser les bras, mais hors de question de s’arrêter. Ton apparition m’a fait perdre assez de temps. On gagne du terrain, mais au vu de ce que cette chose a laissé derrière elle jusqu’ici, pas question de lui laisser reprendre de la distance.

    - C’est vous qui avez l’arme en main, comme on dit chez moi. À votre guise. Mais la journée a été riche en rebondissements, on a marché toute la journée, le soir tombe et mes jambes ne me portent plus. Sans parler de la faim qui me tenaille » grommèle le garçon. « Je crois sincèrement que vous commettez une méprise.

- Silence, impertinent ! Quel âge as-tu pour pouvoir jauger que les uns ou les autres font fausse route ! Et comme tu dis, c’est moi qui manie l’arc. » Mais malgré elle, la jeune elfe ne peut s’empêcher de sourire discrètement. Un hurlement bestial à glacer le sang retenti, bientôt repris en chœur par d’autres, efface bien vite son sourire.



    Un peu plus tôt, Nelson et Victor depuis leur point d’observation échangent des regards interrogateurs. Faut-il entrer en contact avec la ravissante créature ? Le destin ne leur laisse pas le soin de trancher. Les grognements des deux loups dans leur direction ne laissent planer aucun doute. Leur position est connue. Un rire léger monte vers les arbres.

    « Approchez jeunes gens. Les cris que vous lancez à intervalles et le bruit de vos bottes font que je sais votre présence depuis un moment. Seriez-vous perdus dans ces magnifiques bois ? N’ayez aucune crainte mes fidèles compagnons se montreront des plus amicaux, … tant que je leur en donne l’ordre. Ne soyez pas timides, sortez de votre cachette et venez vous présenter. Je suis Mirel la barde et serais ravie de pouvoir converser avec vous. J’ai beau aimer les animaux, les conversations poussées me manquent quelquefois. »

    Haussant les épaules à Victor qui le questionne du regard, Nelson se relève de son taillis et s’avance vers la chanteuse, suivi de près par le roublard. Parvenus à quelques mètres de distance, les grognements rapprochés des deux carnassiers leurs font porter la main au fourreau, sous le regard amusé de leur hôtesse.

    « Allons, ne laissez pas la bile vous envahir, mes agneaux. Mes gardes sont un tantinet protecteur ». Elle se baisse, leur murmure à l’oreille et les deux créatures, toujours grognant, s’éloignent de quelques mètres.

    Les présentations sont esquissées. Mirel s’enquit de leur état et leur propose de leur servir de guide jusqu’à Hap. Un repas est partagé, la route reprise, des morceaux de vie échangés. Nelson toujours prompt aux rodomontades y trouve un terrain favorable et multiplie les récits de ‘ses’ exploits personnels sous les applaudissements nourris de la demi-elfe, qui en redemande. Elle commence à composer des odes à la gloire du héros du Valbataille. Les loups pour leur part, s’ils ne se laissent pas approcher semblent gagnés par la bonne ambiance régnante.

    Alors que le soir se rapproche, la joyeuse compagnie se fixe dans une clairière à proximité du cours d’eau vive, dresse le campement et, après un frugal repas, Mirel se propose de jouer les premiers couplets de la geste de Nelson. La mélopée débute, la merveilleuse voix de Mirel s’élève et le ravissement gagne l’auditoire tandis que les loups se rapprochent pour se lover aux pieds de leur maîtresse. Les deux garçons sentent une douce torpeur les envahir et Victor ferme bientôt les paupières. Une voix intérieure alarme bientôt le guerrier, on use de magie à son endroit. S’arrachant de sa somnolence, Nelson s’ébroue, secoue son ami pour le réveiller et jette un regard mauvais à la barde. Narquoise, elle soutient son regard sans broncher et interrompt sa mélodie.

    « Tu es vraiment encore plus idiot que je ne le pensais, Nelson le bravache. Je t’offrais une mort douce, tu optes pour la douleur. À l’attaque mes anges. Que le festin commence !» Se relevant promptement les deux prédateurs s’avancent en grognant vers leurs proies. Les deux jeunes s’emparent de leurs armes. Les belligérants se jaugent. À quelques pas de là, dans la clarté blafarde de la lune, le souffle de la barde semble s’accélérer, devient soudainement haché, comme douloureux. Son corps, autrefois gracile et harmonieux, se cambre sous une tension insupportable. Sa peau perle de sueur avant de se tendre, se craqueler, comme si quelque chose poussait de l’intérieur pour la déchirer. Ses doigts tremblent, se recourbent, les ongles noircissent, s’allongent, deviennent des griffes. Elle pousse un cri — un son mi-humain, mi-animal — alors que ses articulations se déplacent, que ses os se brisent et se reforment dans un craquement sec. Ses yeux, autrefois d’un brun doux, brillent d’un éclat doré et félin, et sa mâchoire s’étire en un museau déformé, hérissé de crocs. Elle hurle de nouveau à la nuit et ses loups s’associent à sa mélopée sauvage.

    À quelques mètres de là, Elquirel se fige, puis sans un regard pour Tuskan, file en direction du hurlement. Bien que privé de sorts, Tuskan s’élance sur ses talons. Entendre jaillir le cri de guerre de son fidèle ami « Nelson, Nelson, Ouais ! » lui redonne du courage. Mais la vision d’une créature mi-homme, mi-loup hurlant dans la clairière tandis que deux loups s’abattent sur ses camarades le rempli d’effroi. L’elfe, un peu en amont, ne s’embarrasse guère de ses considérations et lâche flèche sur flèche sur le monstre qui se rue furieux à sa rencontre. Une terrible mêlée s’enclenche.

    « Tymora me protège. Sans sort, à quoi je peux bien servir, ne sachant même pas manier cette fichue bardiche. Et puis zut, que les Abysses me foudroient, tu deviseras plus tard, Tuskan »

    Dans un haussement d’épaule, le mage se porte au soutien de l’elfe. Ce qu’il pense être son plus beau coup à l’aide de son arme, ne rencontre que le vide. Son adversaire est bien trop puissant. Changeant de tactique, le jeune homme rompt le combat et se porte au secours de ses amis. Presque arrivé à leur hauteur, il constate que Nelson vient de finir son adversaire et s’apprête à se jeter sur celui d’un Victor en bien fâcheuse posture.

    « Laisse, je m’en charge, occupe-toi du chef.
    - Tuskan ? Que fais-tu ici ?
    - Plus tard elle est dans de sales draps court la sauver
    - Cette saleté d’elfe, j’en fait mon affaire !
    - Euh non, surtout pas, elle est de notre côté ! C’est le garou dont tu dois t’occuper !».

    Mais le guerrier ne l’écoute déjà plus et relâchant son cri de guerre, il fonce en direction des grognements et bruits de combat. Dès qu’il avise le monstre, il charge sans une once d’hésitation. Prise entre une habile sabreuse et un puissant combattant, Mirel passe vite de vie à trépas et Nelson s'accapare sa hachette finement ciselée. Le calme revenu, Tuskan introduit tout ce beau petit monde, tout en bandant les plaies de son comparse.







samedi 14 juin 2025

Campagne de Valperdu - La sombre forêt

 Campagne de Valperdu - La sombre forêt

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1359 : 10 Eléasis (suite)

    La sombre forêt semble comme pétrifiée. Sise dans une cuvette d’environ deux kilomètres de rayon. Au sol, nulle feuille, aucune trace de vie. Tout y est mortellement silencieux. Une abomination aux yeux de Chauntea qui doit être soignée par tout moyen déclare un Georges profondément heurté. Tuskan recourt à la magie pour s’élever dans les airs et depuis la lisière de la zone morte, au centre de la cuvette, il distingue une masse plus sombre. La compagnie propose de s’installer en bordure et de profiter de la nuit qui se profile pour goûter quelque repos. Mais Gidéon exhorte la troupe à se lancer de suite dans l’exploration. Nullement découragé par le peu de succès rencontré, il s’enfonce seul dans la lugubre contrée. Après avoir parcouru deux cent mètres, il débouche sur une clairière Les arbres qui l’occupent sont plus massifs que leurs homologues alentours. Un étrange pressentiment le met mal à l’aise. Soudain un hurlement rappelant celui d’un loup en plus sinistre retentit. D’autres lui répondent bientôt en différents points de la forêt. Une meute semble se lancer dans une chasse et leur gibier n’est pas difficile à deviner. Le jeune homme, saisi de terreur, s’élance de toute sa vitesse en direction de son campement. Les créatures semblent chercher à l’encercler. Alors que l’étau se resserre, ses amis, accourus à la rescousse, le rejoigne, la troupe rebrousse chemin au plus vite. Les monstres semblent lâcher prise dès qu’ils sortent des bois. En périphérie, Victor jurerait avoir entraperçu une ombre gigantesque. La confrérie profite du calme revenu pour passer au lit.

1359 : 11 Eléasis

    Les aventuriers, tous les sens aux aguets, investissent la zone morte. L’idée étant de se diriger au centre de la cuvette vers la masse de noirceur.  Dans la cendre, des traces révèlent le passage récent de loups. Rapidement des hurlements glaçants envahissent le calme pesant des lieux. L’objectif des créatures ne laisse planer aucun doute, elles encerclent le groupe et resserrent peu à peu le cercle. Elles sont bientôt visibles. Il s’agit bien de créatures lupines morts-vivantes. Sans attendre Kasdanthur allume une des bougies découvertes dans le repaire du magicien à Hap. « Voilà qui devrait les ralentir quelque peu » note t-il satisfait.

    Un féroce combat s’engage, mais gênés par l’effet magique, les prédateurs ne sont pas en mesure de proposer une attaque concertée. Au contraire des Valiens habitués à combattre en rang serré. Les monstres sont détruits un par un. Mais les jeunes jubilent un peu trop vite. Alors qu’oubliant toute prudence, ils échangent forces bravades, une énorme branche, de la taille des cuisses de Nelson, vient heurter le guerrier en plein torse, l’envoyant voler plusieurs mètres en arrière. Un arbre mort extirpe ses racines du sol et vient se mêler à la mêlée. Son regard rougeoyant brûle de malveillance. Malgré la puissance de ses coups, il est rapidement clair que la bougie du nain qui continue de diffuser ses essences gêne la monstruosité. Georges saisie d’une horreur mystique par cette perversion de la nature, redouble de charge. Quel que soit l’origine du mal, un treant, fidèle gardien des arbres a connu une ultime profanation. Nelson ne ménage pas sa peine pour se venger de l’affront fait à sa dignité et le reste du groupe multiplie les coups. Bientôt le mort-vivant, vacille et s’écroule lourdement dans la poussière. Chacun reprend ses esprits et la colonne reprend sa marche dans l’environnement lugubre de la forêt morte.

    Bientôt, des pierres affleurent du sol et marquent la présence d’antiques habitations, poursuivant plus avant, la compagnie débouche sur des ruines plus imposantes. Leur origine elfique ne fait aucun doute. Voici l’origine de la masse sombre observée le jour précédent au centre de la cuvette. Alors que Tuskan commence à étudier les lieux, l’irruption de six squelettes repousse à plus tard ses chères études. La fureur des combats s’élève. Les simulacres de vie bien que ne connaissant nulle peur, sont vite terrassés. La finesse de leurs os et leur taille semblent indiquer qu’ils furent autrefois des elfes. Chacun arbore un médaillon d’argent stylisant des arbres. Le groupe en déduit qu’il pourrait s’agir du symbole d’une maison elfique. Chacun récupère un médaillon. Certains l’enfilent d’autres plus prudents optent pour l’envelopper et le ranger dans leur paquetage. Leurs lames sont elles aussi d’excellente facture malgré leur apparence gracile et rejoignent l’arsenal du groupe. Une fouille plus méthodique des environs débute.

Bientôt le sifflement de Georges rameute la petite troupe. Il a débusqué un escalier qui s’enfonce sous terre. Bien qu’un coude masque rapidement la voie, il est indéniable qu’une source de lumière diffuse sa clarté. Gidéon le nyctalope se risque dans le boyau. Parvenu dans le virage, il aperçoit un couloir illuminé magiquement qui se termine quelques mètres plus loin par une lourde porte de chêne. Des gravures représentant des arbres y figurent couplées à une épée longue stylisée fichée dans un crâne et s'extirpant par sa bouche. Le larron fait son rapport au groupe. Alors que l’on convient de procéder à la présence d’un piège éventuel, Nelson gagné par la lassitude, se rue dans le boyau et jetant toute prudence aux orties, ouvre la porte, sans rien déclencher fort heureusement.



    Le battant s’ouvre sur une petite pièce carrée. En son centre, est posée une harpe. Une double porte de pierre sans ornement fait face directement à son homologue en chêne dans le mur du fond. Dans un angle un squelette vêtu d’une robe de bure, épée courte au fourreau, semble observer attentivement le puissant guerrier qui vient de faire irruption et la curieuse cohorte qui lui emboîte le pas. Sans aucune agressivité, il accueille, dans un parfait commun, les visiteurs et se présente comme un membre  de la maison elfique Ichante. Se montrant tout particulièrement chaleureux envers Tuskan qui porte ostensiblement le médaillon de sa maison, il l’engage à poursuivre plus avant dans le complexe. Et propose de jouer un air de harpe à ses visiteurs, mais essuie leur refus. Gidéon, Victor et Kasdanthur suivent l’exemple du jeune mage et enfilent le bijou. Ils peuvent sans souci suivre le lanceur de sort. Seuls Georges et Nelson, méfiants, s’y refusent. Le squelette leur interdit de pousser plus avant. Après quelques tergiversations et tentatives avortées de négociation, ils finissent eux aussi par obtempérer et passent autour de leur cou le médaillon pour poursuivre dans le couloir sombre.

 














    Le groupe parvient alors dans un couloir bordé d’alcôves. Aucun piège n’étant détecté, Gidéon utilise sa baguette de détection des passages secrets. Mais sans plus de réussite. La porte suivante s’ouvre sur une nouvelle pièce carrée. En son centre repose un cercueil de verre. Il abrite une superbe jeune elfe qui semble endormie. Derrière, sur une estrade, un trône de verre, le même arbre stylisé y est gravé. Un autre squelette en robe de bure y est assis et observe les héros de son regard rouge hypnotique. Il arbore lui aussi le médaillon de la famille Ichante. A proximité, un présentoir sur lequel repose un antique livre ouvert duquel irradie une forte chaleur. Dans le mur du fond une alcôve abrite une étrange sphère noire qui ne laisse rien présager de bon.

    Après quelques instants où chacun se dévisage intensément, Kasdanthur rompt l’immobilisme ambiant en se jetant sur sa bougie et en l’allumant afin de tenir à distance l’inquiétant mort-vivant. Ce dernier, nullement impressionné en retour effectue de ses bras d'amples mouvements de bras, dévoilant un court instant un anneau d'un rouge intense fixé çà un doigt décharné. Lorsque ses bras retombent la Nelson, Tuskan et Victor ont tout simplement disparu …

dimanche 1 juin 2025

Campagne de Valperdu - Retour à la maison

 Campagne de Valperdu - Retour à la maison

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1359 : 07 Eléasis

    S’appuyant sur la carte régionale subtilisée au Zhentarim, nos héros localisent d’antiques vestiges, indubitablement d’origine naine. Manifestement, de vieux comptoirs commerciaux adossés à un fortin. Le soleil est déjà au zénith. Malgré l’impatience extrême de Kasdanthur qui pousse à investiguer plus avant, le groupe fait halte pour se restaurer. Puis l’exploration méthodique reprend. Le regard de Nelson s’enflamme bientôt, tandis que ses locataires élémentaires perçoivent la proximité d’un de leur frère. Un sifflement sur leur droite fait accourir toute la communauté qui s’était espacée. Victor vient de découvrir deux immenses statues de forgerons nains de plus de trois mètres de haut.


« Bien vu, fiston ! » lâche un Kasdanthur fébrile. « La porte ne doit pas être loin. ».

Et il s’avance gaillardement vers les œuvres de ses ancêtres. Les jeunes le voient emprunter un escalier qui se termine dans la paroi. Les échelons gravis, le prêtre-guerrier s’agenouille et ses prières rauques montent vers les nuées.

Depuis leur position, les garçons sidérés voient se dessiner sur la roche le dessin de portes surmontées de deux étoiles à quatre branches et d’une enclume. Deux sortes d’écuelles de pierre émergent de la paroi.

« Eh, ce n’est pas la copie de l’étrange tatouage qui orne sa voûte plantaire malodorante ? »  questionne Georges.

« Vil faquin qui nous baladait avec ses histoires de rides étranges et sans valeur quand on l’interrogeait. » s’amuse Tuskan.

« Bon allons, le retrouver avant qu’il ne fasse des âneries » prévient Gidéon.

« Je vous rejoins, je m’occupe de trouver un endroit sûr et herbeux pour les montures. Qui sait combien de temps on va errer sous la montagne. » rajoute le mage

« A condition que le bourru dispose d’un moyen d’entrer …. » glisse un Victor au sourire narquois

« Y’a intérêt. C’est à l’intérieur que ça se passe, je le sens. S’il le faut je bousille la montagne pour y entrer. » lâche Nelson le regard fiévreux. Sans remarquer les regards inquiets qu’échangent Tuskan et Georges dans son dos…

Tandis que Tuskan regroupe les chevaux, le reste de la troupe rejoint le nain. Ils trouvent ce dernier, en conversation avec des entités constituées de roche. Des élémentaires chargés par ses aïeux de garder l’accès à la mine.


    Mais les portes, demeurent closes. Le prêtre-guerrier tente de déposer différentes offrandes plus ou moins somptuaires dans les contenants apparus. Sans autre résultat que de se faire houspiller par la jeunesse. Son sang, de la lignée du clan de l’Etoile de Fer sera finalement son sésame. Il délivre quelques gouttes dans chacune des écuelles et, dans un grincement inquiétant les linteaux majestueux s’ouvrent pour la première fois depuis depuis trois millénaires.

    Le groupe, rejoint par Tuskan se prépare à explorer les lieux. Des torches révèlent un large couloir de trois mètres de large et de quatre mètres de hauteur parfaitement taillé à même la roche. Passé quelques mètres, une grille empêche toute progression.

    « Contemplez la magnificence du hall de mes ancêtres, jeunes humains !  déclame un Kasdanthur les yeux embués de larmes.

- Le ménage laisse à désirer, ose Gidéon

    - Et garde à l’esprit que cette mine, juridiquement appartient au Valplume, le vieux. Pas d’emballement, ironise Tuskan.

    - Rèpète et tu tâteras de ma hache, cloporte

    - Pour ça faudrait que tu saches encore courir, mais vu ton âge canonique…

    - En tous cas, ça va vous coûter cher en loyer cette location, renchérit Gidéon

    - Espèce de freluquet souffreteux, tu vas voir de quel bois je me chauffe, fulmine le nain

    - Paix le vieux » marque Georges la main sur l’épaule du nain. « Attends d’avoir exploré, la zone avant de débiter ces énergumènes en brindilles. Ils peuvent encore te servir de pare-feu. En tout cas c’est une odyssée qui arrive à son terme. »

    « Pas faux. Je vais devoir délaisser la vie d’aventurier au profit de celle de chef de clan. Au moins je n’aurais plus à entendre vos fadaises. » glousse le nain en jetant un regard mauvais aux deux lanceurs de sort

    « Tu ne vas pas savoir nous abandonner le vieux. Qu’est ce qu’on deviendra sans toi ! » lance, goguenard, Tuskan

    « Oui imagine dans quel pétrin on se fourrera dès que tu auras reposé la hache » ajoute Gidéon un clin d’œil appuyé en direction du mage.

« Au moins vous avez un peu de lucidité, tout n’est pas à jeter ».

    « Bon on y va ou on attend la Rencontre des Boucliers. Va falloir que tu m’aides à dézinguer cette herse le nain. Le mécanise d’ouverture est, sans surprise, à l’intérieur. » s’impatiente Nelson

    « J’ai mon idée sur la question » poursuit, sibyllin, Gidéon tout en farfouillant dans son paquetage.

    Il s’empare d’une fiole dont il ingurgite le contenu. Quelques instants plus tard, métamorphosé en brume, il traverse la barrière sans résistance, reprend corps et actionne le levier d’ouverture. La herse se relève sans bruit comme huilée du jour.

    « Travail de nain, graines de vaurien, travail de nain. »

    Une découverte prudente des alentours commence. Le couloir mène à une vaste pièce baignée par un puits de lumière. Une déchirure béante d’environ dix mètres de diamètre dans son plafond en est la source. La pièce est jonchée de débris de roches, de végétation et de cadavres d’animaux et de petits humanoïdes, vraisemblablement des kobolds.

    « Travail de nain, le nain, travail de nain » raille Victor

    « Ose persiffler une fois de plus et je t’arrache la langue le sournois »

    Tuskan coupe alors : « Arrêtez vos chamailleries, deux minutes. C’est quoi cet arbre jaunâtre près du puits, Georges ? Matez-moi ça, les squelettes sont plus nombreux encore à proximité de ses racines.

    - Un hibiscus d’Aurile je dirais. Bourré d’épines. Inoffensif. Superbe floraison automnale qui perdure malgré les gelées » avance le prêtre après quelques instants d’observation.

    « Sûr de ce que t’avance, gamin ? Y’a quand même un truc à l’origine de tous ses macchabés. 

    -Tu te fais trop de souci, le vieux. Georges a toujours été le premier en cours de botanique » assure Gidéon. Et il s’avance hardiment pour identifier les causes des décès.

    A quelques mètres du tronc, il fouille le premier corps. « Eh regardez ! Il a encore sa bourse, qui sait sur quel trésor je viens de mettre le grappin. »  Un mauvais pressentiment lui parcourt l’échine et, vif comme l’éclair, il effectue une magistrale roulade sur sa droite tandis qu’une volée d’épines vient se ficher dans le sol juste où il se trouvait un instant auparavant.

    « Inoffensif, hein ? Foutus je sais tout » maugrée Nelson tout en chargeant en direction de l’horrible arbre.

    « Attends faut le harceler de là où ses épines ne sauraient l’attendre » hurle Tuskan à son compère.

     Peine perdue, le guerrier suivi comme son ombre par le nain s’élance pour le corps-à-corps. Le mage hausse les épaules et commence son incantation. Sur sa gauche, Georges fait tournoyer sa fronde. Dans le même temps, Gidéon et Victor tachent de se trouver une zone à l’abri des épines. Les projectiles mauves de Tuskan sifflent aux oreilles des combattants, les dépassent et viennent s’écraser sur le tronc. L’arbre relâche une floppée de piques plus nombreuses encore, lardant les deux compères en approche. Arrivé au pied de l’arbre, Nelson s’avise de changer de tactique au dernier instant. Au lieu d’abattre son fléau, il jette sa torche au pied de la plante, fait demi-tour et, sans écouter les récriminations offusquées du nain, l’entraîne de force hors de portée des épines malgré une nouvelle bordée.

    La compagnie laisse l’arbre se consumer doucement et lui tourne le dos pour continuer l’exploration de la grotte après avoir pansée ses plaies. Kasdanthur les interpelle rapidement. Il a découvert une gigantesque forge qui se remet en route à son approche. Y percevant un signe divin, le prélat s’agenouille et récite une prière. En réalité, la forge est magique, un élémentaire y est lié et l’active. Malgré son âge, elle est toujours pleinement fonctionnelle. Il suffit de lui apporter la matière première. C’est du moins ce qu’apprend le nain en échangeant avec l’élémentaire.


    Tandis que le prêtre-guerrier dialogue avec l’esprit de la forge, Nelson, consumé par l’impatience, s’éloigne explorer la zone ouest de la caverne, Gidéon sur les talons. La route qui mène à l’élémentaire qu’il convoite passe par là, il en est certain. Le dallage impeccable cède la place à un plancher naturel. Alors qu’il s’enfonce dans la grotte, ils réveillent une colonie de chauve-souris qui paniquée entrave leur progression. A peine le temps de s’extirper de la nuée qui finit par s’échapper par la cheminée naturelle creusée par l’effondrement du plafond que deux énormes chauve-souris de plus d’un mètre d’envergure passent à l’attaque. Elles ne sont que de peu de poids face au guerrier qui les exterminent impitoyablement. 

    Tandis que le reste de la communauté les rejoint, Gidéon fait main basse sur des gemmes et des pièces d’or éparpillées dans la grotte. Un joli petit pactole.  L’exploration de la mine reprend, sous l’impulsion d’un Nelson de plus en plus nerveux. Il sent qu’il lui faut traverser la rivière qui coupe la grotte.

    Alors que ce dernier emprunte un guet en compagnie de Victor, Gidéon et Kasdanthur, l’eau de la rivière se met à bouillonner de façon exponentielle.  Un esprit de l’eau en émerge et passe à l’attaque. Faisant appel à la puissance de son dieu, Georges, resté en retrait, élimine promptement la menace.

    Nelson, quasi extatique reprend sa marche en avant et découvre le trésor qu’il est venu chercher un peu plus loin. L’élémentaire de terre. Lévitant au-dessus du sol, le même étrange ballet martial entre les différents éléments reprend de plus belle. Mais pour trois jours cette fois. Résignés, ces compagnons dressent le campement à proximité pour veiller sur leur ami pendant sa longue phase d’assimilation. Georges et Tuskan ne cachent pas leur inquiétude quant à ce qui pourrait se produire lorsque leur frère d’armes aura fusionné avec les quatre élémentaires. Vraisemblablement pas ce à quoi Nelson assurément.

1359 : 10 Eléasis

    Nelson revenu dans le monde des vivants, chacun s’enquiert de son état. Georges l’ausculte et teste ses réflexes. Tout semble normal hormis son regard emprunt de flammèches à intervalle.  Les explorateurs remontent en selle et prennent la direction de la forêt d’arbres morts entraperçue lors de leurs précédentes missions. 


vendredi 4 avril 2025

La pièce secrète

 Campagne de Valperdu - La pièce secrète

Chapitre précédent

1359 : 02 Eléasis

    Gidéon repère cinq portes que dissimulent des illusions, mais l’intensité de la cloche allant crescendo et l’appareillage magique infernal tournant de plus en plus vite, Nelson et lui s’empressent de vider les lieux et de retrouver le reste de la troupe, en surface, pour réfléchir à la conduite à adopter.

    Tandis qu’il détaille ce qu’ils ont pu observer, le jeune arpenteur d’ombre esquisse dans la poussière les lieux et les portes à l’aide d’un bâton. Au vu du dessin, le groupe conclut qu’il doit exister non pas cinq mais sept portes. Le débat s’engage sur la pertinence d’entreprendre une exploration plus poussée. Si Kasdanthur, Georges et Victor marquent leur désapprobation, Tuskan, Gidéon et Nelson ne veulent surtout pas laisser passer l’occasion d’en apprendre plus. Et tandis que les trois premiers, craignant le pire, s’éloignent de la zone magique, Gidéon et Nelson après s’être assurés que le carillon et le manège infernal se sont tus, retournent sur leur pas, suivis d’un Tuskan plus prudent qui depuis les escaliers assure la liaison entre les explorateurs et le reste du groupe.

    S’ensuit quelques tests pour tenter de mieux comprendre la diabolique machinerie. Peine perdue, tous les essais de poser le pied sur le sous-sol se soldent immanquablement par le redémarrage du mécanisme qui au bout d’un certain laps de temps libère un effet magique, a priori aléatoire, avant de s’immobiliser si plus personne n’est dans la pièce ou, dans le cas contraire, de se relancer de plus belle. Nelson se retrouve ainsi victime de la foudre, sans trop de gravité, tandis que les trois compères voient se flétrir plusieurs de leurs potions durant leurs expérimentations. Il ne semble guère exister de possibilité d’arrêter l’engin.

    Tuskan, après une courte prière à Mystra, s’engage alors dans la pièce afin de vérifier si, comme il le pense, des portes ont pu échapper à l’expertise de son compagnon. Si lui-même ne repère rien de plus, fermant les yeux pour lutter contre les illusions. Sur un pan de mur qui pourrait accueillir une porte non-détectée jusque-là, il farfouille la surface, et sa main se referme bientôt sur une poignée. Bingo, sa théorie se confirme. Il ouvre la porte, mais le mécanisme infernal devant se relancer incessamment, il opte pour la sagesse, retraverse l’espace et remonte l’escalier. Son rapport aiguille la légendaire cupidité naine et Kasdanthur décide de rejoindre le trio et de se lancer lui aussi dans l’exploration.

    Le prêtre-guerrier et le jeune arpenteur d’ombre se risquent sur le sol pavé et s’orientent vers la porte ouverte soi-disant entrebâillée par Tuskan. Leur vision ne leur indique qu’un mur lisse. Mais le toucher confirme les dires du mage. Malgré leur appréhension de heurter le mur, alors que l’intensité de la machinerie va croissant, ils s’enfoncent dans l’illusion et découvrent un couloir illuminé magiquement qu’une grille à son extrémité coupe d’une pièce attenante. Une clef suspendue sur le mur attend sagement d’être décrochée pour permettre de passer l’obstacle.

« Touche à rien, gamin, ça a tout du piège » lâche Kasdanthur.

« Non, sans déconner le vieux ! » ironise Gidéon.

    Et effectivement, une analyse rapide révèle que le piton sur lequel la clef glisserait en cas de saisie de l’objet est piégé. Les deux aventuriers choisissent prudemment de rebrousser chemin. Mais tandis que le nain quitte la pièce, convaincu qu’il s’agit d’une pièce entièrement piégée, le roublard et Nelson décident de tenter leur chance sur une seconde porte, visible celle-ci. Alors qu’ils l’inspectent une nuée de projectiles magiques crachés par la folle machinerie les heurtent de plein fouet. La pièce se révèle, elle aussi, un piège, à bascule cette fois. Ils reprennent ensuite le chemin de la surface pour se faire soigner par un Georges qui ne leur épargne nullement l’économie de sermons moralisateurs sur leur vaine et destructrice cupidité.

 De vifs débats s’engagent. Faut-il ou non poursuivre l’investigation. Les trois curieux s’entêtent et suscitent les reproches de leurs amis. Le nain les menace même de refuser de les soigner s’ils reviennent blessés de nouveau. Peine perdue. Revigorés, ils redescendent l’escalier et se relaient pour inspecter méticuleusement la zone, exploration entrecoupée de remontées intempestives dans l’escalier lorsque l’engin central de la pièce crépite trop ardemment. Les quatre portes suivantes confirment les dires de leurs amis. La pièce ne semble qu’un vaste parc à pièges échafaudé par un dément. Découragés, les trois comparses regagnent la surface pour y affronter les regards réprobateurs et lourds de « on vous l’avait pourtant bien dit » du reste de la communauté. La journée étant bien entamée, décision est prise de camper sur place. A la suite d’une maigre collation, dans un climat maussade, chacun regagne sa tente ou son tour de garde. La nuit se passe sans heurt. L’odeur du brouet matinal concocté par Georges vient chatouiller les narines des héros et les extirpe de leurs rêveries.


1359 : 03 Eléasis

    Dans un climat toujours tendu, les membres du groupe empaquettent leurs affaires pour reprendre la route de Hap et de leur val.

Alors que Georges et Kasdanthur se mettent en marche, Gidéon croise le regard empreint de mélancolie de Tuskan en direction de l’escalier.

    « C’est quand même c… de se débiner alors qu’il ne reste qu’une porte à étudier, nan ? ».

    Le regard fiévreux de son ami lui confirme qu’il a fait mouche.

    « Et toi le balourd, t’en penses quoi ? » glisse le Tuskan au guerrier.

    Le colosse ne se donne pas la peine de répondre et sprinte pour arrêter ses camarades qui s’engageaient déjà sur la sente qui descend au village.

    Guoguenards les deux lanceurs de sorts, sans attendre leur retour, lâchent leurs paquetages et s’enfoncent dans les profondeurs. Victor qui lambinait, leur emboîte cette fois le pas. Les deux mages ne prêtent qu’une oreille distraite à la machinerie qui se remet en mouvement dès qu’ils foulent le dallage de la salle pour piquer droit sur l’ultime porte inexplorée. Au contraire de Victor qui découvre les lieux et n’est guère rassuré.

    L’analyse de Gidéon ne révélant rien de spécial, ils tournent la poignée et découvrent un long couloir de trois mètres de large sur neuf mètres de long et de trois mètres de hauteur. Dès l’entrée, à un mètre sur le côté droit et à hauteur d’homme, s’offre aux regards une plaque métallique portant l’inscription « seuls les multiples de 3 te sauveront ». À peine les deux roublards ont-ils terminé la lecture qu’une onde de choc les projette au sol et les blesse sérieusement.  Des runes explosives ! Tuskan un peu en retrait est épargné par l’aire d’effet. Le temps de se remettre d’aplomb et la progression reprend prudente. À intervalle, alors que l’un ou l’autre pose le pied sur une dalle, un cliquetis fait suer nos trois compères à grosses gouttes, sans plus d’effet. Il semble ne s’agir que d’un leurre destiné à jouer avec leurs nerfs. Parvenus au fond du passage, un levier semble l’unique point d’action. Après une rapide analyse de la situation, alors que les deux roublards semblent s’accorder sur le fait que l’objet n’est pas piégé, Tuskan, baisse le levier sans plus attendre. Le mur coulisse alors permettant l’accès à une nouvelle portion. Dans le nouvel espace un second levier permet la remise en place du mur de pierre. Au fond une porte. Alor qu’ils s’en approchent, une bouche se matérialise dans le bois de la structure et déclame « bienvenue maître Dracandros ». Après quelques instants d’hésitation Tuskan l’entrouvre, révélant une vaste salle plongée dans l’obscurité.

    La lueur de leurs torches laisse deviner des rangées d’étagère et du mobilier.

    « File prévenir les autres qu’on a du nouveau » glisse Gidéon à l’oreille de Victor. « Ils ne sont pas loin.

    - Et nous on va jeter un œil. » ajoute Tuskan

    - « Me douterait que vous alliez faire de telles âneries ! Tâchez de ne pas vous faire tuer » leur lâche Victor avant de disparaître à leur vue.

    Prudemment les deux compères mettent un pied dans la salle. L’approche leur révèle une salle richement meublée, emplie de bibliothèques et d’ustensiles dédiés à la magie. L’excitation est à son comble. Les aventuriers ont mis à jour une cache magique !

    Mais leur joie est de courte durée. Une créature cauchemardesque, sorte d’immense serpent squelettique surgit de derrière un angle et incante de puissants sortilèges. Les deux magiciens se retrouvent d'abord ralentis dans leurs mouvements puis, tandis qu'ils devaient dégainer leurs armes, Gidéon se fige, victime d'un sort d'immobilisation de personnes. Le monstre fond ensuite sur les deux imprudents. L’enfer s’invite dans la pièce. Sa morsure arrache un large lambeau de peau du bras de Gidéon qui reste figé dans une expression d'horreur. Tuskan vole au secours de son frère d’arme. Ses projectiles heurtent la créature, qui bronche à peine. 

    Alors que les crocs béants du monstre menacent de se refermer sur la gorge du mage, un terrible moulinet de fléau le cueille en pleine face. L’irruption de leurs amis vient de leur sauver la mise. La bête est vite cernée et, malgré sa puissance, se révèle incapable de résister aux coups qui pleuvent de toutes parts. Et bientôt la consistance qui lui offrait un simulacre de vie, se délite et ses os pleuvent au sol. Les prêtres se hâtent de soigner leurs camarades, puis l’étude minutieuse de la structure commence.


    Il s’agit vraisemblablement des quartiers privés du défunt mage rouge Dracandros. Des collections d’ouvrages s’amoncellent, un laboratoire impressionnant s’offre aux regards ainsi qu’un mobilier d’un luxe extrême. Le groupe n’en revient pas de sa découverte. Une frénésie de convoitise s’empare de tout un chacun et l’on s’active pour regrouper ce qui apparaît comme les biens les plus précieux à disposition.

    Les héros mettent ainsi la main sur des os de naga (ou du moins est-ce l’identification supposée de la bête), un autel de Mystra et un ouvrage magnifiquement enluminé. Niveau magie des bougies, des parchemins, un large miroir incrusté dans la paroi, une baguette, une superbe boîte métallique, une dague, une clef en argent, une assiette creuse, un pichet en terre cuite, deux potions.

    Tandis qu’il étudie le miroir, Tuskan perçoit des volutes de fumée qui y tournoient. Une recherche approfondie sera utile. La bibliothèque à disposition permettra peut-être d’en apprendre un peu plus. Tandis qu’il fait part de ses constatations, Kasdanthur à quelques mètres sonde le mur et hurle qu’il a trouvé quelque chose. Toute la troupe se presse autour du guerrier/prêtre. Un passage secret débouche sur une vue imprenable sur Hap depuis la face sud de la montagne. Vraisemblablement un lieu de méditation et de fuite ultime.

    Le groupe ravi emballe les objets magiques transportables. Le lieu constituerait vraisemblablement un repaire idéal. Mais l’heure est au retour. Parvenus à Hap le groupe, ne révèle pas sa découverte, mais insiste plutôt sur le caractère dangereux de la zone, puis, promettant de revenir bientôt, nos aventuriers prennent la route de Valperdu.


1359 : 04 Eléasis

     Après une nuit de repos mérité auprès de leurs familles, nos héros se retrouvent chez maître Anthar pour l’identification de leurs trouvailles par ce dernier et Tuskan :

    Georges et Tuskan héritent chacun d’un parchemin de protection contre les souffles de dragon. Georges se voient remettre une cape +1, maître Anthar offrir une boîte de conservation infinie, Gidéon s’octroie une dague +1. Les bougies vertes permettent la mémorisation de sorts supplémentaires (de niveau 1 à 3) et Gidéon et Tuskan se les partagent (respectivement 22 et 24 charges), les blanches protègent contre les morts-vivants sur 12 mètres et sont réparties entre Victor et Kasdanthur (respectivement 20 et 24 charges). La boîte s’ouvre via un mot de passe et recèle des pierres iouns : seule une violette offrant l’infravision (Nelson) et une bleue claire, non identifiée, sont encore utilisables. La baguette permet de localiser les passages secrets (55 charges) et revient à Gidéon. Une dague de garde permet de détecter les ondes mauvaises (sur commande) et Victor la glisse à la ceinture. Pichet et assiette rejoignent le paquetage de Kasdanthur (eau ou bière infinie et mets infinis toutes les 10 heures). La clef facilite l’apprentissage des sorts et Tuskan l’enfile sur la chaîne qu’il porte autour du cou. Les potions sont des potions de grands soins que se partagent Nelson et Gidéon.

 1359 : 05 au 07 Eléasis

    La caravane de Triaphe prend ses quartiers dans le petit village. Triomphant son propriétaire ne peut s’empêcher de narrer aux jeunes qu’il a décroché un contrat mirifique auprès d’un Sembien installé à Monteloy. Dans le cadre des noces de sa fille à la mode sembienne, ce dernier paie une fortune pour passer commande d’habits pour l’ensemble des convives.  La commande équivaut à un demi-million de lions d’or de marchandises. Sa commission sera de de 10%. L’affaire de sa vie qui lui assurera une retraite paisible. Il souhaite que Sonia et leur fille Elisa l’accompagnent au septentrion pour découvrir les contrées de la mer de Lune. Gidéon approuve l’initiative sous les reproches d’un Tuskan ahuri qui jure que dans la cité du nord ce ne sont tous que des sauvages racistes, prêts à esclavagiser leur prochain. N’empêche cette nouvelle suscite quelques remous. Si d’aventure la cargaison n’arrivait pas à destination, Triaphe s’en trouverait ruiné et dans la dépendance complète de son commanditaire. Les jeunes s’enquièrent alors des mesures sécuritaires adoptées. Le caravanier est plus que confiant des mesures déployées et s’emploie à les rassurer. Le commerce reprend vite ses droits, Georges et Nelson négocient écailles et griffes de dragon au marchand. Tuskan des tissus précieux pour la robe de sa promise. Perturbé par les préparatifs qui montent en puissance, il ne parvient pas, dans les heures qui suivent à se concentrer suffisamment pour apprendre un nouveau sortilège, tout le contraire de Gidéon qui ne se prive pas de lui faire vertement remarquer son manque d’implication….

    Le 06 au soir attablés à la taverne en compagnie de leurs proches, les héros se décident à accompagner leur ami nain pour localiser les mines de ses ancêtres.

jeudi 20 février 2025

Campagne de Valperdu - Light my fire

Campagne de Valperdu - Light my fire

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 1359 : 29 Flammerige

Après deux paisibles journées de chevauchée, la bande rallie Hap, son entrée dans la petite bourgade saluée par un nouveau tremblement de terre. Renseignements pris ces secousses sont récentes et ne manquent pas d’inquiéter la communauté. Le groupe, pressé par Nelson se prépare à entamer l’exploration du système cavernicole. Rations et matériel sont répartis équitablement avant de tâcher de goûter quelque repos.

1359 : 30 Flammerige

    Débute la lente ascension de la face ouest de la Dent de Hap. La première caverne s’enfonce profondément dans le volcan. Une dizaine de squelettes jonche le sol, des drows (au vu de leur mise). Cela indique que la grotte a déjà reçu de la visite mais qu’a-t-il bien pu se passer en ce lieu ? Après s’être enfoncés sur une longue distance, une fourche oblige les aventuriers à opérer un choix. Le chemin emprunté mène bientôt à la lumière du jour sur versant du volcan. Les héros, se référant à la position du soleil et au paysage qui s’offre à leur vue, estiment se trouver sur la face nord. Rebroussant chemin la troupe revient à l’embranchement et opte pour le passage inexploré. 

    Bientôt d’imposantes toiles d’araignée obstruent le passage. N’écoutant que leur courage les jeunes avancent en brulant les fils qui ralentissent leur progression. Et bientôt débouchent sur une imposante caverne. La noirceur des lieux empêche de se faire une idée du fond de la grotte, mais les étranges cliquetis qui résonnent un peu partout marquent une présence multiple. Les garçons se décident à avancer, pour se retrouver assaillis par une horde d’imposantes araignées qui fondent sur eux à une vitesse sidérante. Sans la force de Nelson et les talents de bretteur de Gidéon, la dextérité et le poison auraient offert un bien appétissant déjeuner aux créatures. Le combat est bref et intense et Tuskan en sort sérieusement meurtri. Malgré tout, il utilise la lévitation pour examiner le plafond de la grotte. À intervalles, des poches abritent des œufs. Quelques palabres plus loin, le groupe, à court de soins, décide de ne pas détruire les nids. Gidéon recueille les glandes à venin des monstres sans certitude de pouvoir en faire quelque chose ainsi que quelques œufs, sous le regard désapprobateur de ses compagnons. La fouille du reste de la grotte révèle un nouveau cadavre desséché, elfique semble-t-il. 

    Mais, il est temps de reprendre le chemin de Hap pour faire soigner Tuskan encore fortement amoindri au temple de Lathandre. Ce dernier insiste pour que l’on fabrique une civière et qu’on descende le corps du défunt pour lui offrir une saine sépulture au village. Sur place, il règle à la prêtresse la note des soins et obsèques. Lui et Georges qui l’accompagne sont ébahis de constater que le pouvoir curatif sort du minéral, le Sang de Lathandre, qui palpite intensément pour venir refermer les plaies. Alors qu’ils se dirigent vers la taverne pour y retrouver leurs compagnons, ils sont ravis d’apercevoir Victor qui les rallie en provenance de Valperdu. Le groupe réuni partage un solide repas avant de reprendre le chemin qui serpente vers les grottes volcaniques. Kastandhur pour sa part souhaite s’entretenir avec Ephron pour tenter de glaner de précieuses informations sur la mine de ses ancêtres et décide de rester au village sous les lazzis des jeunes garçons qui moquent un nain qui aurait peur du noir et des araignées !

    La caverne empruntée permet à la fois d’opter pour un couloir ascendant et un autre descendant. Choix est arrêté de prendre le second. Une lente mais régulière descente commence Bientôt, un faible éclairage provenant d’une mousse violette sur les parois du conduit permet de faire l’économie de torches. Le boyau finit par déboucher sur une plateforme naturelle d’où les aventuriers peuvent contempler un saisissant village entièrement constitué d’une sorte de toile d’araignée. D’étranges cabanons, une douzaine, occupent le sol et le plafond de la grotte ainsi qu’une structure centrale en forme de dôme imposante en construction. Elle semble héberger une créature colossale. D’étranges humanoïdes arachnéens, assez petits de taille, aux bras multiples vaquent au milieu des bâtiments ou s’attellent à réparer des parties de toile abîmées. Au vu des différences de taille, il s’agit vraisemblablement d’adultes et des enfants.



    « On attaque de suite » lâche un Nelson dont le regard s’illumine déjà de la perspective d’un combat.

    « Pas question, on a affaire à des villageois, on laisse tomber et on les contourne » objecte Georges.

    « À coup sûr, il s’agit de créatures malfaisantes. On ne peut les laisser derrière nous » poursuit un Gidéon toujours enclin à abonder dans le sens de Nelson.

    « Il y a des femmes et des enfants, c’est non ! » assène Tuskan.

    « Peuh, tu voulais il y a quelques heures détruire des œufs car les araignées sont des nuisibles, et parce qu’elles marchent sur deux pattes, elles méritent soudain de vivre. Quelle cohérence ! » glisse sournoisement Nelson.

    « Oui, et ben, parlons-en de la cohérence. Me semble que tu veux mettre la main sur le deuxième frère de ton parasite. C’est en se faisant trucider ou en devant rebrousser chemin parce que blessés et sans possibilité de se soigner qu’on va progresser dans la mission pour laquelle, je te le rappelle, on ne fait que t’assister ».

    La remarque fit-elle mouche auprès de Nelson ou de l’élémentaire ? En tout cas, le guerrier se renfrogne quelque peu avant de céder et d’approuver le contournement du campement. La descente reprend et bientôt toute notion de temps est perdue. Lorsqu’il croise des embranchements, le groupe opte systématiquement pour le corridor qui semble descendre. L’assèchement de l’air et la montée progressive de la température semblent indiquer qu’ils sont sur la bonne piste. Ereintés et assoiffés, ils choisissent bientôt de faire halte afin de prendre une collation et se désaltérer avant de se remettre en route. Un rougeoiement dans le lointain marque bientôt la présence de lave. Débouchant sur une caverne les garçons observent une rivière de magma qui la coupe en deux. Un pont de pierre naturel permet de rejoindre l’autre rive. La température atteint une puissance difficilement supportable. S’interrogeant du regard sur la marche à suivre, c’est Nelson qui prend l’initiative.


    « Ok, je vous ai amenés là et en plus je suis vraisemblablement le plus costaud, j’ouvre la voie ». Ni une ni deux, il s’avance près du fleuve et entreprend d’emprunter le pont. De leur observatoire, les jeunes le voient peiner et s’arrêter essoufflé au milieu de l’obstacle, avant de repartir en claudiquant et de s’éloigner de la fournaise.

    Depuis sa nouvelle position, il hèle ses comparses « c’est une horreur, c’est hyper difficile, mais faisable ». Le reste du groupe déglutit. Si leur colosse d’airain peine à passer l’obstacle, est-ce franchissable pour eux ? Les regards appuyés en direction du frêle Gidéon marquent leur certitude que de son côté se sera peine perdue. Pour autant, hors de question de laisser le guerrier continuer seul. Car ils en sont intimement convaincus, son hôte le poussera à continuer avec ou sans eux. Respirant un grand coup, Georges s’élance. Chacun retient son souffle, s’il tombe terrassé au milieu de l’obstacle, qui sera assez fort pour se porter à son secours ? Mais, non sans peine, il parvient à passer. Ses amis peuvent l’observer grimacer de douleur de l’autre côté du courant. Reste les deux lanceurs de sorts et Victor. Hochant du chef en leur direction, Tuskan s’avance de quelques pas en direction de la rivière, puis récite une litanie. Ses amis étonnés voient croître sur ses épaules des ailes, il peut alors franchir le piège en altitude à distance respectable de la fournaise. Imitant son raisonnement, Victor et Gidéon optent pour l’escalade de la paroi de la grotte au risque de chuter, afin là aussi de prendre suffisamment de hauteur pour éviter au maximum les effets délétères de la chaleur. Si le roublard a fait montre de son talent et de son agilité remarquable, l'arpenteur a été contraint d'utiliser une précieuse potion d'escalade.



    Le groupe reconstitué peut alors reprendre sa route. Le chemin les guide bientôt vers une fontaine de lave alimentée par le courant. Des pierres dans le liquide visqueux permettent de rejoindre la fontaine. En son centre flotte une silhouette magmatique. « Mon frère, enfin ! » explose une voix dans le crâne de Nelson. Sans plus réfléchir, le guerrier s’engage avec vélocité sur le sentier pierreux. Parvenu à la source, il est soulevé à quelque distance du sol, la tête en arrière, les yeux révulsés, les bras en croix et une étrange chorégraphie se met en place. Les deux élementaires semblant lutter pour prendre possession du corps de jeune homme. Tandis que ses compères observent la scène fascinés, Victor hurle « Branle-bas de combat ! ». Quatre créatures serpentines enflammées, s’extirpent en effet du lit de magma et ondulent en direction du groupe.

    Les sorts et les projectiles fusent. Deux monstres s’effondrent avant d’avoir pu arriver au contact. Mais tandis qu’un furieux corps-à-corps commence, Gidéon déglutit : « Par la Dame Dorée ! ». Une créature nimbée de flammes de plus de deux mètres, d’aspect grossièrement humanoïde aux cornes et aux crocs proéminents pose le pied hors du magma. Son immense épée est parcourue de flammes. « Un adepte des flammes et je viens de griller mes derniers sortilèges » gémit Tuskan. Le combat change d’âme. La victoire qui semblait facile devient soudain plus lointaine. Les plus faibles tâchent de s’occuper des serpents survivant tandis que, bravement Victor et Georges s’apprêtent à en découdre avec le géant igné. Son assaut est foudroyant et Georges déjà durement éprouvé par l’épisode du pont est obligé de rompre le combat. Victor tente toutes les passes d’armes qu’il maîtrise mais ses coups ne sont que de peu d’effet. Il perd rapidement pied. Horrifiés ses compères le voient faiblir face aux assauts furieux de la créature, c’est alors que Georges constate une chose surprenante, des lambeaux de chair incandescents chutent de l’adepte à mesure qu’il s’éloigne de sa source brûlante.  Il crie alors au roublard de fuir en entraînant le monstre sur ses talons. Sitôt dit, le jeune voleur s’enfuit en prenant soin de se faire poursuivre. La ruse fonctionne et à terme l’adepte des flammes sérieusement affaibli, tente de se replier vers sa demeure. Mais trop éloigné, il se désagrège à quelques encablures de sa planche de salut. Tandis que les jeunes crient victoire, Nelson, littéralement crucifié reste toujours en proie aux luttes d’influence des deux entités. Le groupe en piteux état, décide de s’éloigner du bassin par prudence et installe un bivouac à distance respectueuse tout en s’assurant un point d’observation du guerrier. La ‘nuit’, si l’on peut se fier à l’état de fatigue des protagonistes se passe sans plus d’histoire. Les faveurs de Chauntéa assurent au groupe de panser leurs blessures. Mais Nelson est toujours dans la même position. L’attente paraît interminable avant qu’il ne remette pied à terre, des flammèches dansant au fond de son regard. La fusion est achevée, elle devrait avoir durée une journée entière selon les estimations des protagonistes. Il est temps pour les héros de regagner Hap.


1359 : 01 Eléasis

    Préparés, le pont n’est plus un écueil. La fusion a permis à Nelson de développer une résistance naturelle au feu et Tuskan permet à Victor et Gidéon de léviter tandis que lui-même se métamorphose pour voler au-dessus du foyer ardent. Le retour se déroule sans anicroche. Toutefois, dans la grotte des arachnéens, une image saisissante est maintenant posée sur l'immense boule de toile. Une gigantesque araignée ailée.  

    Une fois à Hap, Nelson peut expliquer le principe de fusion tel qu’il le vit. Chaque élémentaire lui amène un pouvoir et un choix en fonction du nombre d’hôtes qu’il héberge. Chacun luttant pour être élu au plus haut rang. Ainsi avec 2 êtres peut-il opter pour un pouvoir de rang 1 chez l’un et le rang 2 chez l’autre. Pour l’heure il a donc opté pour le rang 1 de l’air et le rang 2 du feu, mais le choix ne convient pas tout à fait. Il souhaite changer, sachant que le processus va redemander une journée entière. D’un commun accord, le groupe souhaitant monter jusqu’à la tour de Dracandros, on opte pour profiter de la sécurité de l’auberge pour qu’il s’exécute sur le champ. Cela permettra au reste de la troupe de récupérer et d’initier différentes actions. Nelson, gagne sa chambre, Gidéon se rend chez l’herboriste local pour fabriquer un poison à partir des glandes arachnéennes récoltés plus tôt, Tuskan se plonge dans son grimoire et Georges faisant appel à sa divinité crée des baies nourricières, utiles pour les explorations futures. Ephron leur apprend qu'au vu de ses vêtements, le cadavre rapatrié était bien un elfe, un mage passé par le village deux ans auparavant et qui s’est risqué dans les grottes, sans plus d’explication. Qui dit mage, dit livre de sort. Où peut donc bien se trouver son équipement ?

1359 : 02 Eléasis

    Le lendemain, reposée et rééquipée, la troupe reprend l’ascension du volcan avec pour objectif la tour de Dracandros. Au sommet, reposent les ruines de la structure et les dépouilles mortelles de trois imposants vers de plus de dix mètres. Au milieu des ossements, d’énormes serpents noirs de près de trois mètres de long se réchauffent au soleil. Les héros s’approchent prêts à en découdre et comme les en avaient avertis les villageois, les reptiles en sifflant passent aussitôt à l’attaque. Bien préparé, le groupe parvient sans peine à éliminer quatre créatures et leurs pairs rompent le combat sans demander leur reste et disparaissent dans d’énormes trous dans le sol. Ingrédients recherchés, les jeunes s’empressent de récupérer des restes de dragons (écailles, corne, ossements) avant de de se risquer à s’aventurer dans les ruines.



    Gidéon part en éclaireur. La tour est éventrée et il distingue un escalier en colimaçon qui s’enfonce sous terre. Avec Victor, ils vérifient qu’aucun piège ne menace leur progression, puis les jeunes gens empruntent l’escalier qui semble encore praticable. Gidéon, par précaution, lance une détection de la magie. Ils parviennent dans une vaste pièce en demi-sphère d'environ 9 m de rayon. Elle abrite un fin cône éclairant la pièce d'1m de hauteur en son centre au-dessus duquel lévite une simple et fine couronne de métal (de l'électrum, semble-t-il) d'environ un mètre de diamètre. Un tas de cendres repose dans la partie nord. Une puissante aura magique d’altération ainsi que d’autres écoles se dégage de la couronne. La pièce sphérique renvoie, elle, une magie d'illusion depuis 7 points spécifiques.  Soudain la couronne se met à carillonner et à virer au bleu.

« M’étonnerait que ce soit pour nous souhaiter la bienvenue » grogne Victor.